Les C-130 Hercules de l’armée de l’air française pourraient bientôt être équipés de missiles AASM de Sagem. C’est en tout cas ce à quoi travaille la société AA/ROK, filiale du groupe Arinc. « L’idée à la base c’était de trouver un moyen de faire de l’appui-feu sur une longue durée, pour un coût réduit. On a donc pensé à un système d’appui-feu emporté sous la voilure d’un C-130 Hercules, en mettant des AASM à la place du bidon de kérosène », explique-t-on chez AA/ROK, qui a baptisé le système « Gerfaut ».
A l’origine du projet, un retour d’expérience de la bande saharo-sahélienne, avant même l’engagement au Mali. Alors qu’un certain nombre d’opérations des forces spéciales sont déclenchées, avec un besoin d’appui aérien, il n’était pas toujours possible de projeter les moyens nécessaires. « Avec l’AASM et la solution que nous proposons, il n’y a pas besoin de faire évoluer le C-130 de manière trop importante, on ne touche pas à la structure de l’avion », explique Patrick Gaillard, ancien du ministère de la Défense et initiateur du projet, avec Fanny Turgis. « Pourquoi mobiliser deux Rafale et un ravitailleur, alors qu’on pourrait utiliser un seul avion pour faire plusieurs missions », telle est la question que se sont posé les deux fondateurs du projet.
Le Gerfaut se présente comme un système complètement amovible, « plug and play », qui permet simplement de remplacer le bidon de kérosène situé sous l’aile par un ensemble composé d’une poutre, qui supporte les lance-bombes. La poutre permet de « stocker » toute la partie électronique des missiles, centrale inertielle, GPS et électronique nécessaire pour les larguer. En tout, un C-130 pourrait théoriquement emporter jusqu’à huit AASM. La modularité est le maître mot de ce système, qui permet un « panachage », en montant par exemple un lance-bombe à l’arrière et un pod de désignation à l’avant.
Un câble relie le système à l’intérieur de l’avion, qui peut ensuite être contrôlé par le biais d’un boîtier depuis la planche de bord du navigateur. Pas besoin de personnel supplémentaire à bord, le lancement peut être effectué par le mécanicien navigant ou par un FAC (Forward Air Controller).
Le bénéfice de l’intégration d’un tel équipement est clair : Augmenter les capacités du C-130 – en particulier pour les forces spéciales – tout en maîtrisant les coûts.
L’idée de ce projet date de juillet 2011. Un brevet est déposé deux mois plus tard, avant la création d’AA/ROK en décembre de la même année. « Nous avons présenté ce projet à la mission innovation de la DGA, puis avons reçu la validation technique, juste avant le dépôt du brevet. » Par la suite, c’est le COS (Commandement des opérations spéciales) qui a validé pour le côté opérationnel. « L’un a déclaré qu’il n’y avait pas de raison que ça ne fonctionne pas, l’autre a trouvé ça très utile », explique Patrick Gaillard, « c’est à ce moment-là qu’on s’est lancés ».
AA/ROK s’associe donc avec Sagem pour la partie système de l’AASM, avec Rafaut qui s’occupe de la poutre, mais également avec l’AIA de Clermont-Ferrand, qui assure la maintenance des cellules, des équipements des aéronefs des armées, ainsi que les chantiers de modernisation ou de transformation. « On ne fait que reprendre tel quel un système qui a déjà fait ses preuves, donc on ne repasse pas par toutes les étapes de qualification, ce qui nous fait gagner beaucoup de temps », précise Patrick Gaillard.
AA/ROK est aujourd’hui en mesure de produire un prototype et attend avec impatience l’appel d’offres qui doit permettre de lancer un vaste programme de rénovation des C-130 de l’armée de l’air. L’entreprise s’est rapprochée de plusieurs maîtres d’œuvre pour proposer la solution Gerfaut, en attendant les spécifications exactes du chantier de rénovation. Un appel d’offres très attendu, qui devait tomber il y a plusieurs mois, puis début juin et qui, comme l’espère Patrick Gaillard, ne devrait aujourd’hui plus trop tarder.