Quelques progrès dans le domaine de la coopération de Défense ne peuvent pourtant pas occulter l’énorme travail à effectuer pour que l’Union européenne puisse adopter dans un futur plus ou moins proche une vision commune et mener une diplomatie unie à l’extérieur. Un certain nombre de chantiers restent à mener.
Première chose à prendre en considération, l’articulation entre l’OTAN et les organes décisionnels militaires au sein de l’Union européenne. Le général Jean-Paul Paloméros, commandant suprême allié de l’OTAN pour la transformation : « La coopération entre l’OTAN et l’UE est permanente, afin d’identifier dans un cadre contraint les pistes les plus prometteuses. Il est de notre devoir de coopérer au mieux pour avoir les meilleures capacités possibles au final. » Il ajoute que « l’interopérabilité c’est la clé du travail », et notamment dans le domaine du ravitaillement en vol. Car si l’OTAN définit les standards, il faut pourtant s’assurer que la vision développée à la fois par l’Union européenne peut être intégrée aux capacités de l’OTAN et vice-versa. Tout l’enjeu pour le futur sera donc de réussir à établir des standards et des méthodes qui éviteront les « doublons » entre l’OTAN et l’UE.
Autre chantier, le renforcement et le développement de l’EATC, le commandement européen de transport aérien militaire (European Air Transport Command). Lancé en septembre 2010 par la France, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique, l’EATC est l’organe central chargé de coordonner et de déployer les flottes de transport des pays partenaires. Le Luxembourg l’a rejoint en décembre 2012, l’Espagne s’apprête à le faire à l’été 2014 et l’Italie est actuellement en pourparlers. L’arrivée de l’A400M dans les principales flottes européennes pourrait permettre de renforcer le rôle de l’EATC en tant que gestionnaire unique à l’échelle européenne de l’exploitation des avions de transport.
Le chantier le plus médiatique de l’Europe de la Défense est celui des drones MALE. Une décision politique est attendue sur ce dossier lors du Conseil européen, mais il n’est pas sûr qu’elle aboutisse, en raison de certaines réticences nationales. Comme le souligne le général Paloméros, « nous avons raté le coche sur les drones, mais le maintien de la capacité est crucial. Il ne faut pas que demain on se retrouve dans la même situation d’aujourd’hui, à savoir parer au plus pressé. » Pour autant, il se montre plutôt optimiste, déclarant : « on a réussi à le faire pour le transport aérien, il n’y a pas de raison qu’on ne trouve pas de solution d’avenir pour les drones ». Le plus important relève bien sûr des dirigeants, qui doivent définir leurs besoins, afin de pouvoir les répercuter sur les industriels chargés du développement des aéronefs. A cet égard, l’annonce conjointe de juin 2013 de Dassault Aviation, Alenia Aermacchi et Cassidian sur la possibilité de mise en œuvre d’un programme conjoint semble répondre aux objectifs à atteindre. Cependant, la route d’un futur drone européen reste encore semée d’embûches, à commencer par les budgets en baisse et les difficultés de se coordonner sur les besoins et les exigences à une échelle supranationale.
L’Agence européenne de Défense liste quant à elle quatre grands chantiers prioritaires : le ravitaillement en vol, avec un objectif affiché de posséder une « flotte multinationale » à partir de 2019 ; les drones, afin d’aboutir à une solution à dimension européenne à l’horizon 2020-2025 ; la communication par satellites et la cyberdéfense.
Concernant le ravitaillement en vol, l’AED résume son approche en trois points : le recours à des opérateurs « commerciaux » pour pallier les manques à court terme, Omega Air étant pour l’instant le seul fournisseur en Europe ; l’optimisation des capacités existantes, 42 tankers de neuf types différents et des campagnes d’homologation entre les tankers et les chasseurs ; l’optimisation d’une flotte d’A400M en version ravitailleurs.
Dans le domaine des drones, l’AED met l’accent sur la nécessité de développer un programme de certification, ainsi que de s’atteler à l’intégration des drones militaires dans l’espace aérien général. L’AED se penche également sur la question de l’indépendance de l’Europe vis-à-vis de pays « tiers » – les États-Unis pour ne pas les nommer – en ce qui concerne les technologies développées dans le cadre des drones, comme les systèmes de liaison de données et les capteurs.
