Décidément, le monde du fret aérien français a encore du plomb dans les ailes. Ces dernières années avaient pourtant été marquées par de nouvelles et réelles ambitions sur les liaisons intercontinentales, avec la naissance du transporteur CMA CGM Air Cargo en 2021 et la mise en place d’un partenariat stratégique avec Air France-KLM dans le domaine du fret aérien l’année dernière.
Mais le divorce est finalement prononcé pour le 31 mars, même si les deux partenaires continueront encore officiellement à coopérer sur le plan commercial.
La raison de l’arrêt brutal de ce partenariat est officiellement lié « à environnement réglementaire contraint sur certains marchés importants ». Il s’agit, en plus clair, d’un refus du Département des Transports des États-Unis (DoT) concernant l’intégration de CMA CGM Air Cargo au sein de la JV créée par Air France-KLM, Delta Air Lines et Virgin Atlantic sur le marché transatlantique.
Évidemment, les conséquences d’une telle décision pourraient logiquement venir au détriment des ambitions de l’armateur français depuis l’Hexagone, avec des inquiétudes légitimes de la section CMA-CGM Air Cargo du Syndicat National des Pilotes de Ligne (SNPL CCAC) qui révèle que deux futurs 777F commandés seront directement exploités sous un CTA américain, sans parler des interrogations portant sur le reste de la flotte aujourd’hui basée à CDG (5 avions). Air France dispose encore quant à elle de deux 777F basés à CDG, les autres appareils cargo du groupe étant basés à Amsterdam. Bien entendu, la force d’Air France-KLM réside surtout dans l’utilisation des soutes de ses avions gros-porteurs de transport de passagers.
Le transport aérien mondial de marchandises connaît pourtant depuis quelques mois des signes encourageants de croissance selon l’IATA, avec une hausse des recettes qui devraient être supérieures de 11% à ceux de 2019, malgré les incertitudes qui planent toujours sur le commerce mondial. De plus, le transport maritime par conteneurs est maintenant fortement impacté par le contournement de l’Afrique (accroissement des durées de transport, moindre disponibilité des navires) avec la situation en Mer rouge, avec un Freightos Baltic Index quasiment multiplié par trois en un mois (et encore plus entre la Chine et l’Europe).
En attendant, GEODIS, la filiale du groupe SNCF spécialisée dans la logistique va continuer à exploiter son A330-300F ente la Chine et le Royaume-Uni pendant encore au moins un an, même si le transporteur a décidé de ne plus desservir les États-Unis il y a quelques mois. Quant à la jeune compagnie FTL Airlines, elle continue ses opérations entre la Chine et Vatry avec son unique A330-200 Preighter en location depuis 6 mois. Enfin, sur les courtes distances, ASL Airlines tient toujours son marché avec ses 737 cargo, soutenu par un groupe irlandais solide.
Mais les vrais grands gagnants de l’échec du rapprochement de CMA CGM Air Cargo et Air France seront logiquement les grands acteurs bien connus basés à Francfort, à Findel, à Dubaï et à Doha…
Finalement, c’est un peu comme si l’histoire se répétait une deuxième fois.

