Le moins que l’on puisse dire, c’est que le grand retour du Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace au Bourget a tout d’abord véritablement tenu ses promesses, avec ces quelque 400 000 visiteurs professionnels et passionnés. C’est un vrai camouflet face aux attaques incessantes de certains médias et activistes contre l’aviation, dans leur faux combat contre un bien réel réchauffement climatique, et tout particulièrement en France. Le salon du Bourget aura ainsi été une vitrine historique pour toutes les initiatives en cours pour venir réduire les émissions du secteur, cette fameuse « quatrième révolution de l’aviation » comme l’a qualifiait d’ailleurs le patron d’Airbus Guillaume Faury quelques jours avant l’ouverture du salon. On retiendra quand même cette nouvelle attaque menée par 22 associations européennes contre certaines compagnies aériennes du Vieux Continent accusées de « greenwashing » en plein salon, un timing bien savamment orchestré…
Cette 54e édition du salon du Bourget aura également été un véritable succès en termes de commandes d’avions commerciaux, y compris pour le segment des gros-porteurs, même si certaines étaient déjà annoncées depuis quelques mois. Selon le décompte de la société de conseil britannique IBA, ce sont plus de 72,4 milliards de dollars de commandes qui ont ainsi été enregistrées au Bourget (contrats fermes, MoU, LoI et options d’achats) pour 1303 appareils, un record depuis 10 ans. Mieux, 89% de ces commandes correspondent à des contrats fermes, du jamais vu durant un salon aéronautique. Ce qui aura évidemment particulièrement marqué les esprits, c’est cette commande de la compagnie indienne IndiGo pour 500 monocouloirs Airbus, une démarche logique face aux nouvelles ambitions de sa concurrente Air India, et qui représente un nouveau tournant pour le secteur, tant par son gigantisme que par le calendrier des livraisons des appareils. Certains de ces avions seront en effet assemblés en 2034-2035, ce qui en dit long sur l’évolution à venir des backlog chez les deux principaux avionneurs mondiaux, en particulier pour Airbus, et plus généralement sur l’augmentation de la demande de voyages pour la prochaine décennie, notamment en dehors de l’Europe.
Autre orientation marquante de ce salon du Bourget, la très grande quantité d’annonces concernant la maintenance et les services après-vente, et ce pour toutes les régions du monde, un phénomène qui va évidemment de pair avec la très forte augmentation des besoins liés à la reprise du trafic aérien mondial, avec ces quelque 30 000 avions de ligne à faire voler en toute sécurité tous les jours.
Mais cette édition du Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace aura clairement aussi été influencée par l’actuelle situation géopolitique internationale, avec la guerre en Ukraine et les tensions croissantes en mer de Chine méridionale. SCAF, drones, nouveaux missiles, motorisation du programme de recherche ENGRT (EU Next Generation Rotorcraft Technologies Project) visant à un futur programme d’hélicoptère militaire européen ont ainsi marqué le secteur de la défense, particulièrement présent au Bourget cette année. On aura aussi quelque peu ressenti cette véritable poussée du futur standard F5 du Rafale de Dassault Aviation, avec ses probables effecteurs déportés (dont un qui pourrait être dérivé du nEUROn), une solution qui devrait monter à bord de la prochaine loi de programmation militaire pour venir au départ palier au retard du futur avion de combat européen, si ce n’est pas plus…
Dernière tendance marquante du salon du Bourget cette année, plutôt négative cette fois, le très grand nombre de projets plus ou moins avancés concernant certains programmes d’aéronefs 100% électriques comme les « eVTOL », certains vraiment crédibles, d’autres tirants franchement davantage vers l’escroquerie financière. Le Bourget 2023 aura malheureusement été aussi une formidable caisse de résonance pour ce qui ne s’apparente qu’à des entreprises spécialisées dans la communication et la levée de fonds. C’est bien dommage, mais cela colle tellement à notre époque…
