La 55e finale du Super Bowl entre les Buccaneers de Tampa Bay et les Chiefs de Kansas City début février aura assurément profité à l’US Air Force et à son projet de remotorisation du célèbre bombardier B-52. Les dizaines de millions de téléspectateurs auront en effet difficilement manqué les longues traînées sombres du Stratofortress volant en formation serrée avec un B-1B et un B-2, alors que l’on sait que lui seul survivra encore plusieurs décennies, au côté du futur bombardier furtif B-21 Raider qui sera dévoilé l’année prochaine.
Lancé en 2018, le programme de remotorisation CERP (Commercial Engine Replacement Program), qui permettra de prolonger la vie opérationnelle de 75 B-52H jusqu’au milieu du siècle, va bientôt devenir très concret avec la sélection du grand gagnant parmi les trois motoristes en concurrence, qui s’impatientent.
Pratt & Whitney propose ainsi une variante de son PW800, sa nouvelle motorisation jusqu’ici dédiée à l’aviation d’affaires. GE Aviation s’attaque quant à lui à la remotorisation des B-52 avec une double solution : l’une, très conservative, basée sur le CF34-10, l’autre plus ambitieuse, avec son Passport. Enfin, Rolls-Royce entend quant à lui tirer son épingle du jeu en proposant une version de son réacteur BR700, déjà présent sur les Global 6000 et Gulfstream V de l’USAF.
Sur le papier, on pourrait légitimement penser que Pratt & Whitney tient la corde grâce à son expérience de près de 70 ans sur le B-52 (J57 d’origine puis remotorisation TF33). À l’inverse, le motoriste britannique ne part clairement pas favori, mais cela lui ferait tant de bien, quand on connaît ses difficultés actuelles sur le marché des gros réacteurs civils avec la crise. L’équipementier Collins Aerospace ne sera pas en reste non plus avec la délicate tâche d’intégrer la motorisation choisie au niveau des nacelles et des fixations aux mâts réacteurs.
Cet appel d’offres sera d’ailleurs bien loin d’être attribué pour une simple question de coût, ou pour des performances ou des avantages opérationnels différenciants, tant les risques semblent importants au regard de l’âge de la vénérable plateforme. Le plus jeune appareil de la flotte soufflera en effet ses soixante bougies en 2022, tout un symbole.
Le programme CERP c’est ainsi plus de 650 réacteurs (avec les spares) et toutes les modifications associées devant intervenir sur pratiquement l’intégralité de la flotte actuelle. C’est aussi la maintenance associée sur une trentaine d’années, alors que certains avions franchiront très certainement la barre des 100 ans !
On l’aura compris ; à défaut d’être considéré comme le contrat du siècle, le programme de maintien en condition opérationnelle de la flotte de B-52 sera assurément celui de tous les superlatifs.