C’est un tableau particulièrement superbe que nous a dressé Anne Rigail, la directrice générale d’Air France à l’occasion d’une réunion avec les journalistes de l’AJPAE* il y a quelques jours. Après une période particulièrement difficile, la grande compagnie française tient enfin sa revanche, avec un niveau d’activité qui battra tout simplement tous les records au cours des prochaines semaines.
Car avec une flotte désormais entièrement réactivée qui desservira un total de 196 destinations (mais avec 90% des capacités proposés par rapport à 2019), Air France s’attend à d’importantes pointes de trafic durant cette période estivale, avec jusqu’à 120 000 passagers par jour sur son hub de Roissy CDG, et alors même que la région Asie n’a pas encore retrouvé la moitié de son trafic d’avant la pandémie, restrictions de voyages sur la Chine obligent.
Bien sûr, Air France profitera clairement d’une reprise plus forte que prévue constatée de façon générale en Europe et aux Amériques, avec ce phénomène de « voyage de vengeance » lié à l’impossibilité de parcourir le monde durant cette longue période de distanciation sociale forcée. Même avec un carburant plus cher qui pèse lourdement sur le prix des billets, même avec une inflation qui impacte directement les ménages, même avec les incertitudes qui pèsent sur l’avenir de l’économie mondiale, les avions d’Air France seront pleins à craquer cet été.
Il faut dire aussi qu’Air France n’a pas démérité face à la concurrence, en particulier face à ses grandes rivales européennes que sont British Airways et surtout Lufthansa. Contrairement à elles, la compagnie française a clairement voulu maintenir un certain niveau de prestation sur ces vols intra-européens en classe économique, tout en poursuivant sa montée en gamme pour ses clients fréquents et premium (nouveau salon du Terminal 2F, rénovation des cabines des 777 COI, lancement du chantier de modernisation des 12 derniers 777-300ER), une tendance qui va d’ailleurs se poursuivre avec la rénovation du lounge du Terminal 2E (portes K), des projets de nouveaux salons à Los Angeles et San Francisco, une nouvelle cabine La Première… De plus, Air France a poursuivi ses investissements au niveau du renouvellement de sa flotte, un processus qui n’est d’ailleurs qu’au tout début puisqu’avec les récentes réceptions de ses 10e A220 et 18e A350, la part des avions de nouvelle génération est encore très loin des objectifs annoncés de 45% pour 2025 et 70% pour 2030.
Évidemment, il reste encore de multiples inconnues dans l’équation quant à la sortie définitive de la crise par Air France, avec ces lourdes pertes cumulées depuis le début de la pandémie. La forte demande estivale va laisser la place à une longue saison hivernale difficile, avec un trafic affaires qui aura encore du mal à revenir à des niveaux pré-pandémie avant 2023, même si celui-ci a pour l’instant été partiellement compensé par l’émergence d’un segment dit « Premium Leisure » constatée un peu partout sur la planète.
Mais avec l’annonce du redémarrage des recrutements chez Air France depuis quelques mois (300 pilotes de ligne, 200 mécaniciens, 200 agents de passages saisonniers à CDG et Orly, 500 alternants pour les activités liées à l’escale et à la MRO), la compagnie française montre qu’elle a désormais foi en l’avenir. Et finalement, après toutes ces campagnes d’« avion-bashing » orchestrées durant la pandémie, et malheureusement souvent relayées par les « grands médias », c’est peut-être bien là le plus important.
(*) Association des Journalistes Professionnels de l’Aéronautique et de l’Espace