L’industrie du transport aérien se ressent depuis des années comme la cible facile et privilégiée de l’opinion publique lorsque la discussion tourne autour des émissions de polluants, par exemple de CO2 mais aussi de bruit. Particulièrement exposée, elle attire les tentatives de bridage des militants et des politiques, en témoignent l’abandon de projets aéroportuaires en Europe (dès avant la crise) ou les actions annoncées pour limiter l’activité de Schiphol.
Pour contrer cela, l’entièreté du secteur aéronautique a tenté de multiplier la communication sur ses efforts pour décarboner l’aviation, mais celle-ci semble avoir du mal à atteindre les oreilles des personnes qui ne gravitent pas autour du secteur. La dernière étude de la chaire Pégase, menée sur un échantillon d’un millier de personnes représentatives de la population française et publiée la semaine dernière, le montre : seul un tiers des personnes interrogées sur les technologies développées pour décarboner l’aviation a déjà entendu parler de ces technologies. Les recherches sur la propulsion à hydrogène ayant fait davantage de bruit que d’autres leviers plus immédiat et à impact supérieur, la mise en place des technologies de décarbonation paraît lointaine qui plus est.
Dans ces conditions, 12 % des sondés avouent avoir honte lorsqu’ils prennent l’avion et 41 % envisagent de le prendre moins souvent pour des raisons environnementales.
Mais pour le moment, il est difficile de voir cela se traduire dans les faits. Bien que l’effet du « travel revenge » soit passé, la demande continue d’être très forte et les compagnies aériennes annoncent les unes après les autres qu’elles se préparent à un été exceptionnel – tant bien que mal du fait de problèmes de disponibilité des appareils. Alors que l’offre reste en moyenne légèrement moins importante qu’en 2019, les tarifs augmentent également du fait du prix du carburant, des tensions géopolitiques et de la nécessité de financer les actions de décarbonation des compagnies aériennes. La DGAC constate ainsi qu’ils ont été plus de 20 % plus élevés en avril qu’en avril l’année dernière en France, et 32,6 % au-dessus de ceux d’avril 2019, tous faisceaux confondus.
Hausses de tarifs et mauvaise conscience environnementale, un cocktail dangereux pour la demande ? Il semble finalement que les préoccupations de l’opinion soient ailleurs car, alors que nous ne sommes qu’à l’orée de la saison été, les avions sont pleins.

