La deuxième assemblée générale annuelle d’Airlines for Europe (A4E) vient de se clôturer à Bruxelles. L’association, qui parvient à réunir autour d’une même table et faire parler d’une même voix Air France-KLM, Lufthansa, IAG, easyJet et Ryanair depuis 2016, se consacre à faire pression sur l’Union européenne afin que celle-ci prête un regard plus attentionné au transport aérien et le défende face à tout ce qui nuit à sa compétitivité. Un beau programme qui a suscité l’intérêt et l’engagement de leurs consoeurs sur le continent puisque A4E compte désormais une trentaine de membres.
L’association a déjà réussi à se faire entendre. En effet, ses membres pèsent 104 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 332 000 emplois, ce qui ne manque pas d’attirer l’attention des instances européennes. Les compagnies aériennes alertaient déjà l’UE depuis longtemps face à la concurrence jugée déloyale des compagnies du Golfe, ce qui l’avait poussée à réagir avec la Stratégie de l’aviation en décembre 2015 – qui a déjà produit ses premiers effets, par exemple l’ouverture du ciel entre l’Europe et l’ASEAN.
Mais les résultats se font toujours attendre dans les domaines dont A4E a fait ses chevaux de bataille : grèves du contrôle aérien, charges aéroportuaires trop élevées, création de nouvelles taxes…
Ainsi, le contrôle aérien européen a connu 217 jours de grève entre 2010 et 2016, sans compter les perturbations qui se sont répercutées sur les jours suivant les différents mouvements. La perte occasionnée est estimée au minimum à 12 milliards d’euros par l’association – un coût principalement supporté par le secteur du tourisme et non du transport aérien.
Par ailleurs, A4E demande un meilleur encadrement de la politique des charges aéroportuaires dans l’Union européenne. En position de force, nombre d’aéroports ne cessent d’augmenter leurs redevances, écrasant de charges les compagnies aériennes – Thomas Reynaert, le président de l’association, estiment que les taxes aéroports pèsent parfois jusqu’à 37% du prix du billet. Enfin, des taxes sur l’aviation civile sont parfois imposées par des gouvernements plus soucieux de renflouer leurs finances à court terme que de maintenir un environnement favorable à leurs compagnies – c’est le cas au Royaume-Uni par exemple avec la « Air Passenger Duty » qui pousse IAG à renoncer à implanter LEVEL dans le pays.
Si ces deux dernières années de lobbying ont donné une voix à une industrie auparavant inaudible, elles n’ont pas eu d’impact concret, les politiques étant lentes à réagir. Et les choses ne sont pas près de changer car, comme le résume Carsten Spohr, le CEO de Lufthansa, « notre industrie est prise entre des monopoles locaux [aéroports, contrôle aérien etc., ndlr] et des oligopoles mondiaux. » C’est sur les premiers qu’A4E se concentre actuellement.
Ce sont autant de thèmes pour lesquels Air France se bat au niveau national également. Ce deuxième front va se rouvrir le 20 mars avec le lancement des Assises du transport aérien, au sein desquelles la compagnie militera aux côtés de toutes ses consoeurs françaises pour un allègement des charges et une amélioration de l’écosystème dans lequel elles évoluent. « Il ne s’agit pas d’obtenir des aides de l’Etat mais simplement de bénéficier d’un niveau de taxation en phase avec celui de nos voisins européens », avait rappelé Jean-Marc Janaillac, le PDG d’Air France-KLM, en février.
La question est désormais de savoir si les Assises resteront une belle initiative sans conséquence ou si les acteurs du transport aérien français réussiront à faire entendre leurs arguments avec suffisamment de force pour transformer ce qui sera peut-être leur ultime essai pour sauver le pavillon français. L’espoir est mince car les rapports Abraham (2013) et Le Roux (2014), salués par la profession, sont restés cantonnés au statut de cale-meuble. Mais il existe toujours. Comme il existe toujours au niveau européen.

