Durant les deux jours de son sommet sur la décarbonation et l’innovation, Airbus a poursuivi un objectif : convaincre qu’il était toujours pleinement engagé sur le sujet, malgré le signal contraire qu’a récemment envoyé le report de calendrier et les baisses d’investissement sur le programme ZEROe. Des initiatives pour stimuler le développement d’une industrie du carburant durable d’aviation (SAF) aux nouvelles technologies intégrées aux appareils pour améliorer leurs performances, l’avionneur a présenté une série d’innovation sur lesquelles il travaille ou qu’il déploie, afin d’améliorer l’empreinte environnementale de ses produits.
Pour le moment, le sentiment qui domine de l’extérieur est celui d’une stagnation. Alors que 65 % de l’objectif de décarbonation de l’aviation d’ici 2050 repose sur l’utilisation des SAF (selon l’IATA), la vitesse de développement de cette industrie est très loin d’être à la hauteur de l’urgence. Airbus tente d’y remédier par divers partenariats mais a davantage la main sur les 13 % reposant sur les nouvelles technologies. Cependant, là aussi le développement est long.
Guillaume Faury, le président-directeur général d’Airbus, l’entend et compare la situation actuelle à la métamorphose d’un papillon. L’aviation serait dans sa chrysalide, subissant nombre de transformations sans que cela ne soit visible, avant de ressortir papillon, avec des appareils de nouvelle génération à l’architecture disruptive et de nouvelles sources de carburant plus propres.
Alors, pour convaincre que la chrysalide ne cache pas une vulgaire chenille, Airbus a rappelé les innovations les plus emblématiques sur lesquelles il travaillait, notamment pour le successeur de l’A320. Elles tournent notamment autour du choix du concept de motorisation à adopter, entre moteur caréné et open rotor, ou de la forme de l’aile, avec l’option d’une aile partiellement pliable (comme sur 777X) qui permettrait d’augmenter l’envergure pour davantage d’efficacité tout en garantissant la capacité de l’appareil à opérer sur les aéroports actuels. Elles portent sur l’utilisation de nouveaux matériaux, plus légers, sur l’électrification, l’automatisation. Le but pour Airbus est de montrer qu’il reste une sorte de « SpaceX de l’avion ».
Et s’il est aussi attentif à l’appel de Bertrand Piccard, présent pour ouvrir le sommet, à « renouer avec les ruptures technologiques », ce qui n’a plus été fait depuis 60 ans, il se refuse à s’engager dans un « Concorde de l’hydrogène », c’est-à-dire un appareil qui ne serait pas viable commercialement. D’où le décalage de cinq à dix ans du programme ZEROe. L’objectif de 2035 pour faire voler un avion à hydrogène avait d’emblée semblé très ambitieux et Airbus a été rattrapé par la réalité : manque de maturité des technologies, absence d’un écosystème de l’hydrogène au sol, régulation à construire. « Nous aurions tort d’avoir raison trop tôt », concède Guillaume Faury.
Pour autant, pas question d’abandonner le terrain de la communication. Un nouveau concept a donc été présenté, reposant cette fois sur un système de propulsion électrique composé de quatre moteurs (et non plus six) de 2 mégawatts, entraînés par un système de pile à combustible alimenté par deux réservoirs d’hydrogène liquide. Lui aussi mettra du temps à être porté à maturité, s’il y parvient. Mais en attendant, il permet à Airbus de réaffirmer qu’il a les bonnes ambitions technologiques. Qu’il a raison même si c’est un peu trop tôt.