Lorsqu’Airbus a mis un coup de frein au développement de l’avion à hydrogène, il n’a pas pour autant abandonné l’idée d’introduire un avion disruptif sur le marché, le successeur de l’A320neo. L’avionneur travaille dessus depuis des années et commence à entrevoir plus précisément les choix technologiques potentiellement viables qui s’offriront à lui lorsqu’il décidera de lancer le programme – ce qu’il prévoit à la fin de la décennie. La poursuite des développements s’impose toutefois pour faire maturer les nouvelles technologies, qu’il s’agisse du domaine de la propulsion, de l’aérodynamique, de la structure, etc. « Pas à pas, nous fabriquons la potion magique du monocouloir de nouvelle génération », avait résumé Bruno Fichefeux, directeur des futurs programmes chez Airbus, il y a quelques mois. Petit aperçu des ingrédients sur la table.
Le choix de la propulsion déterminant pour la forme de l’appareil
La décision la plus déterminante sera celle de la propulsion. Le successeur de l’A320 n’aura en effet pas la même structure selon qu’Airbus optera pour une architecture traditionnelle de turbofan ou pour une innovation comme l’open rotor. L’open rotor semble la voie la plus prometteuse pour atteindre l’objectif de réduire la consommation de carburant de 20 % à 30 % par rapport à la génération actuelle – « plus de défi mais plus de bénéfices », indique Frank Haselbach, directeur Propulsion engineering chez Airbus. « Nous ne pourrons pas nous passer d’un changement de forme si nous voulons respecter cette contrainte d’amélioration d’au moins 20 % de la consommation », confirme Mohamed Ali, directeur Technologie et Opérations chez GE Aerospace, citant la nécessité de placer la soufflante devant le moteur. « Nous voulons le fan le plus grand possible et la chambre de combustion la plus petite possible », décrit-il, pour obtenir le taux de dilution le plus intéressant possible. C’est pourquoi Airbus est très engagé dans le programme RISE de CFM International, aux côtés de Safran et GE Aerospace, pour évaluer les risques liés à la technologie, comment l’intégrer sur un appareil et préparer les essais. Plusieurs tests, y compris en soufflerie notamment avec l’ONERA, ont déjà été réalisés et ont donné des résultats encourageants. Un prototype sera à terme testé sur le laboratoire volant A380.
Quel que soit le profil de moteur choisi, Airbus souligne qu’il sera compatible avec l’utilisation de 100 % de carburant durable d’aviation.
Le défi des ailes
Autre opportunité de révolutionner la physionomie du futur appareil : l’aile. Plusieurs avancées technologiques sont explorées dans le cadre le programme « Wings of tomorrow ». Pour être plus efficace, l’aile devra être plus longue et plus fine, ce qui permettra d’augmenter la portance et de réduire la traînée. Pour qu’une telle aile, pouvant atteindre 45 mètres d’envergure, puisse opérer dans l’environnement aéroportuaire actuel (qui est adapté à une envergure maximale de 36 mètres), il faudrait donc des ailes repliables.
Airbus travaille également sur le développement d’une aile capable de changer de forme pour s’adapter automatiquement aux conditions de vol, afin de maximiser son efficacité. Le programme eXtra Performance Wing explore ainsi des technologies innovantes de contrôle actif ainsi que des modifications de la structure de l’aile, et l’installation de capteurs qui enregistrent les changements de turbulence et déclenchent les ajustements nécessaires des surfaces de contrôle de l’aile.
Pour des matériaux plus durables
Après la révolution du composite, les matériaux continuent d’évoluer. Dans le cadre du démonstrateur de fuselage multifonctionnel (MFFD), les composites thermoplastiques renforcés de fibres de carbone (CFRTP), notamment issus de biomasse, permettent une réduction de poids similaire aux polymères renforcés de fibres de carbone (CFRP) qu’ils remplacent, tout en étant gagnant en efficacité de fabrication et en recyclabilité.
La promesse de l’hybridation
Airbus est également très engagé dans les études autour de l’électrification et de l’hybridation, qui pourrait apporter un gain de 5 % supplémentaire sur la consommation de carburant. Des batteries pourraient ainsi être utilisées pour alimenter l’avion pendant le roulage, ou pendant le vol pour alimenter des fonctions embarquées telles que le système de climatisation, de dégivrage ou l’éclairage. Avec le programme EcoPulse, mené avec Daher et Safran, l’avionneur a également pu explorer le potentiel des batteries lithium-ion à bord d’un avion doté d’un réseau à haute tension, et éliminer certaines solutions qui n’ont pas fait leurs preuves.
Enfin, un immense travail est également mené dans le domaine des systèmes et de la connectivité. L’idée est de concevoir de futurs systèmes hautement connectés et automatisés, alimentés par des plates-formes informatiques avancées, qui permettront l’installation, la mise à jour et la modification automatiques et immédiates des applications du système. Airbus souhaite également développer encore les technologies d’assistance automatiques pour les pilotes.