Les récentes informations en provenance de la région de Seattle ne sont vraiment pas pour rassurer. Boeing, déjà très largement secoué par les crises à répétition de ces dernières années concernant la sécurité de ses programmes, doit maintenant faire face à une grève « dure » de la part de plus de 30000 salariés travaillant dans ses usines de Renton et d’Everett, impactant directement la production du 737 MAX ainsi que celle des 777F et 767F. La situation de l’avionneur américain était déjà particulièrement critique, avec des livraisons déjà bien réduites par rapport à celles de l’année dernière, et pour pratiquement tous ses programmes d’avions commerciaux.
Pour faire simple, Boeing n’a livré que 248 avions commerciaux à ses clients depuis le début de l’année (dont 198 737 MAX et 32 787), contre 332 pour la même période l’année dernière, une baisse d’un tiers qui pèsera lourdement et durablement sur ces finances. La grève menée depuis le 13 septembre ne va qu’aggraver la situation de l’avionneur, quelle que soit sa durée.
La direction de Boeing entrevoit d’ailleurs déjà la mise en place de mesures drastiques dans les prochaines semaines faute d’accord trouvé très rapidement avec la branche IAM-District 751 du puissant syndicat des machinistes. Après le gel de tous les recrutements, la suspension des voyages non essentiels, l’arrêt de toutes les dépenses de conseil, caritatives, publicitaires et marketing, l’avionneur de Seattle envisage dès à présent de mesures temporaires de chômage pour un grand nombre de ses salariés, mais aussi des mesures drastiques de réduction des coûts en limitant ses achats (avec l’impact que cela engendrera chez ses fournisseurs et sous-traitants), voire des licenciements.
Boeing entend ainsi préserver au maximum sa trésorerie pour pouvoir continuer à soutenir les opérateurs de ses avions, en particulier sa division BGS, tout simplement vitale pour s’assurer un avenir. Boeing veut évidemment mettre une pression supplémentaire sur les grévistes, mais il se prépare aussi à un mouvement long, à l’image de celui de 2008 qui avait duré 50 jours. Évidemment, la situation financière de Boeing était alors bien différente, même si la précédente grève avait réduit de 60% ses livraisons sur l’équivalent d’un trimestre.
La situation est clairement inquiétante pour l’avenir de Boeing. Elle l’est aussi tout autant pour certains de ses clients qui aussi tout miser sur l’avionneur américain, en particulier aux États-Unis, en refusant obstinément de s’ouvrir à la concurrence, ou de toujours privilégier le même. Je pense évidemment à Southwest, mais aussi à United Airlines et à American Airlines pour leurs gros-porteurs par exemple. Les difficultés de Boeing, qui s’accumulent d’année en année, pourraient finalement aussi redistribuer certaines cartes dans le monde ultra-compétitif qu’est le transport aérien…