Boeing est-il en train de perdre définitivement la face dans l’Empire du Milieu ? Les échecs s’accumulent pour l’avionneur américain depuis maintenant quelques années et la récente commande de Xiamen Air pour quarante appareils de la famille A320neo est une véritable défaite, alors que la compagnie chinoise du Fujian n’opère qu’avec des avions commerciaux Boeing depuis son lancement en 1984.
Pire, ce nouveau revers intervient seulement quelques jours après l’organisation d’une réunion entre Boeing et l’Administration de l’aviation civile de Chine (CAAC) au sujet du retour en vol du 737 MAX, un dossier qui s’éternise depuis des mois, malgré un examen technique approfondi des modifications et une consigne de navigabilité pourtant favorable à la fin de l’année dernière.
Quand Airbus multiplie les commandes depuis le début de l’année en Chine, notamment avec les trois commandes géantes d’Air China, China Eastern Airlines et China Southern Airlines pour près de trois cents appareils de la famille A320neo juste avant le salon de Farnborough en juillet, Boeing lui n’y a plus vendu d’avion commercial depuis 2017. Et les livraisons des avions déjà commandés sont toujours repoussées, à l’image des 103 737 MAX 8 attendus par China Southern qui étaient livrables d’ici la fin 2024. En attendant, Boeing doit faire avec, et tenter de replacer les appareils initialement destinés au marché chinois, ou leurs moteurs.
Évidemment, l’escalade des tensions entre les États-Unis et la Chine ne peut y être étrangère, ce qui d’ailleurs avait été reconnu officiellement par Boeing en juillet, ces derniers échecs étant ressentis comme la fin d’un certain équilibre entre les deux avionneurs sur ce marché.
Car si les relations sino-américaines étaient déjà particulièrement tendues sous l’ère Trump, elles se sont clairement considérablement détériorées depuis l’arrivée de l’administration Biden, en particulier sur le dossier de Taïwan. La Chine a d’ailleurs décidé d’imposer des sanctions contre le patron de Boeing Defense, Space & Security au début du mois (et contre le PDG de Raytheon Technologies) en réponse aux récentes ventes d’armes à Taipei.
Autre sujet délicat entre Boeing et les autorités chinoises, le silence de la CAAC quant à l’accident du Boeing 737-800 de la filiale de China Eastern basée au Yunnan le 21 mars dernier alors que des enquêteurs américains impliqués dans l’enquête, en fournissant une aide technique aux autorités chinoises, semblent avoir un idée bien précise des faits.
En attendant, les années passent et nous assistons sans doute à profonde redistribution des cartes entre Airbus et Boeing sur le marché chinois, en particulier sur le segment des monocouloirs. La flotte chinoise restera l’un des principaux moteurs de croissance au cours des 20 prochaines années pour les industriels, avec une demande de l’ordre de 8000 nouveaux avions commerciaux à fournir, à équiper, à soutenir, voire même à recycler.