Dans le domaine aéronautique, l’inquiétude principale des responsables de la Défense se situe au niveau du déficit capacitaire qui guette la France, un déficit dû notamment à des retards, soit dans la livraison (A400M), soit dans le renouvellement de certains programmes (Atlantique 2).
Pour le chef d’état-major de l’armée de l’air (CEMAA), le général Mercier, le déficit de la capacité de transport est « critique ». Il met en garde contre un nouveau retard de livraison de l’A400M, qui pourrait remettre en cause « la capacité à assurer l’évacuation [des] ressortissants en cas de crise ». Au sujet du futur avion de transport d’Airbus Military, Laurent Collet-Billon déclare être partisan d’une plus grosse commande d’appareils, sans toutefois pouvoir l’appliquer par manque de crédits. Il rappelle également l’importance de la première livraison en 2013, afin de ne pas retarder la mise en service opérationnel. Par la suite, les livraisons devraient se poursuivre selon un rythme soutenu, pour atteindre une trentaine d’appareils vers 2017-2018.
Deuxième déficit capacitaire majeur : les avions ravitailleurs. Les C135 FR de Boeing atteignant un âge avancé, il existe un « risque permanent de rupture capacitaire », contraignant en termes de maintenance selon le CEMAA, qui parle d’ailleurs d’un « acharnement thérapeutique » concernant ces appareils. La campagne libyenne a une nouvelle fois été mise en avant pour démontrer la nécessité urgente de se procurer des avions ravitailleurs, afin de ne plus dépendre, même partiellement, des États-Unis. La déclaration du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian le 19 octobre dernier en Espagne, annonçant la commande de 14 A330 MRTT à partir de 2013 semble aller dans le bon sens, il s’agit à présent de passer les commandes prévues, afin d’accélérer le processus de modernisation de la flotte.
Dans la même thématique, le report de la rénovation des avions de patrouille maritime Atlantique 2. Le ministre de la Défense a en effet re-précisé lors de son audition que le programme de rénovation des ATL2 serait reporté, « dans l’attente des choix qui devront être faits » concernant le Livre Blanc et la Loi de programmation militaire (LPM). Il souligne cependant que ce report ne devrait pas avoir de conséquence industrielle « majeure » ni mettre en jeu la sécurité nationale. Le report est de maximum 18 mois. Ce « couteau suisse », ainsi que le nomme l’amiral Rogel, doit absolument être rénové, pour ne pas perdre cette capacité de patrouille maritime. Il cite l’exemple des Britanniques, qui doivent actuellement faire face à une rupture capacitaire dans ce domaine, et « qui le regrettent […] aujourd’hui ».
Toujours du côté de la Marine, le retrait du service actif des Super Etendard en 2016 représente une « course contre la montre » pour les remplacer par des Rafale Marine. Selon les prévisions du CEMM, 38 avions devraient être opérationnels en 2016, au lieu des 40 prévus. De même pour la livraison des NH90 NFH, dont la flotte devrait être constituée de 27 appareils en 2021. Remplaçant les Super Frelon retirés du service actif depuis trois ans, ils vont prendre le relai des 32 Lynx actuels, dont le plan de réduction a déjà débuté. D’où l’importance primordiale de maintenir la cadence de livraison.
A l’armée de Terre, le général Ract-Madoux fait le même constat en ce qui concerne les NH90 TTH. Il met l’accent sur la livraison nécessaire des 68 hélicoptères d’ici à 2020, afin d’assurer la continuité de la composante aéroterrestre et ainsi éviter une rupture capacitaire dans le domaine de l’aérocombat.
Enfin, le CEMAA souligne que les radars sont touchés par l’obsolescence et doivent être rénovés. Il liste également les programmes reportés qui pourraient s’avérer « préjudiciables » à la capacité opérationnelle de l’armée de l‘air : l’obsolescence des missiles Aster 30, du pod RECO NG, du simulateur Mirage 2000C, la rénovation des C130 et des Mirage 2000D, ainsi que la mise aux normes civiles des hélicoptères Puma et Fennec.