Le président de la Commission du Livre Blanc sur la défense et la sécurité nationale Jean-Marie Guéhenno a été entendu ce jeudi 4 octobre par la Commission de la Défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale. Il est notamment revenu sur les missions de ce document, qui va permettre de fixer les orientations futures de l’armée française, et a également détaillé la méthodologie et les enjeux qui se présentent actuellement.
Tout d’abord, Jean-Marie Guéhenno rappelle que le Livre blanc sera une « feuille de route pour la nation » et que les perspectives stratégiques et à long terme doivent absolument être prises en compte, afin d’améliorer la planification de ce que sera l’armée dans le futur. Même si la Commission du Livre blanc se doit de gérer les contraintes à court terme, cela ne doit pas avoir d’influence notable sur les objectifs fixés à moyen et à long terme.
Il faut également « tirer les leçons » du changement de contexte économique et financier, qui a fortement évolué depuis le dernier Livre blanc de 2008. Le président de la Commission du Livre blanc affirme que le monde a beaucoup plus changé entre 2008 et aujourd’hui, qu’entre le Livre blanc des années 90 et 2008. C’est pourquoi il appuie sur la nécessité d’une « réflexion de fond », et notamment en collaboration avec les forces armées, qui sont les plus à même d’orienter et de donner des pistes, par le biais des RETEX, un « capital d’expérience » qui doit être exploité.
Cette audition publique a également permis d’en apprendre un peu plus sur la méthodologie employée par la commission, et notamment la mise en place de sept groupes de travail, chacun étant centré sur un point particulier, afin de « démultiplier » l’action de la commission.
– Un groupe « contexte stratégique », qui devrait poser les jalons et servir de base pour l’orientation générale du Livre blanc.
– Un groupe « cadres d’action », ou la coopération envisagée dans le cadre d’alliances internationales telles que l’OTAN, l’Union européenne ou encore l’ONU.
– Un groupe « sécurité nationale », qui est notamment chargé de clarifier ce concept un peu vague, sujet parfois à de mauvaises interprétations.
– Un groupe « renseignement », chargé d’évaluer la situation dans un contexte national et international.
– Un groupe « format des armées et contrats opérationnels », assurément un groupe au cœur de la stratégie globale du Livre blanc, le « cœur du réacteur », qui doit examiner l’ensemble des moyens disponibles et leur adéquation avec les missions opérationnelles, mais également envisager la restructuration globale des forces armées.
– Un groupe « industries de Défense », là encore, un groupe essentiel, chargé d’examiner les questions de R&D, les technologies qui menacent la sécurité nationale, celles qui donne un avantage offensif ou défensif, le rôle que l’État doit jouer dans ce domaine, afin de soutenir l’économie française et les exportations, les interactions entre industrie civile et militaire.
– Un groupe « ressources », qui doit prendre en compte le format des forces armées.
L’Europe de la Défense a bien entendu été évoquée lors de cette audition. A cet égard, Jean-Marie Guéhenno a déploré que la crise économique cristallise les débats au niveau européen et empêche de prendre véritablement en compte l’importance du politique et en particulier de la politique européenne de sécurité et de Défense. Il a toutefois souligné que la problématique était pourtant « fondamentalement » européenne et que le Livre blanc s’inscrivait dans cette perspective. L’Allemagne et la Grande-Bretagne, dont deux représentants siègent au sein de la commission, sont deux pays « sans lesquels il est difficile d’avancer en Europe ». Mais des échanges sont également prévus avec la Pologne, l’Italie et l’Allemagne.
De plus, des discussions seront menées avec d’autres pays du globe, ainsi, la Commission du Livre blanc souhaite auditionner des pays tels que l’Inde et le Brésil, et peut-être avec Singapour, la Russie et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.
Enfin, le calendrier se resserre et les prochaines étapes sont d’ores et déjà fixées : Un rapport d’étape doit être finalisé pour la seconde moitié du mois de novembre, qui permettra de valider les hypothèses probables d’engagement et les évolutions à apporter à la stratégie globale, et les éventuels abandons/réductions de certaines capacités. A la mi-décembre, il s’agira de pouvoir présenter un produit quasi-fini, afin de présenter le rapport préparatoire au Livre blanc courant janvier. Le passage en Conseil de Défense et le document destiné au public dans le courant du mois de février.