Le rapprochement surprise des compagnies aériennes Spirit et Frontier aux États-Unis est très certainement une tendance qui nous attend aussi bientôt en Europe avec une reprise plus solide de l’activité du transport aérien dans les prochains mois. Le Vieux Continent souffrait déjà, bien avant la pandémie, d’un nombre un peu trop important de compagnies aériennes pour pouvoir dégager des marges suffisantes, en particulier du côté des compagnies aériennes dites « traditionnelles », historiques ou non, et qui ne cessent de se voir tailler des croupières et perdre des parts de marché sur le court/moyen-courrier au profit des compagnies low-cost, et ce depuis la libéralisation du ciel européen.
Évidemment, le groupe Lufthansa a tiré le premier ces derniers jours en formalisant une expression d’intérêt pour acquérir une participation majoritaire dans la jeune ITA, la compagnie qui a succédé à Alitalia et qui est désormais bien plus belle à marier. Mais il faut rappeler que la compagnie allemande s’est toujours particulièrement intéressée au marché italien, que ce soit avec la compagnie régionale Air Dolomiti, rachetée en 2003, ou avec l’initiative ratée de Lufthansa Italia à Milan Malpensa durant moins de deux ans.
Les conséquences du 11 septembre 2001 sur le transport aérien aux États-Unis, suivi de la crise financière de 2008, ont conduit aux fusions géantes de Delta-Northwest (2009), de Continental-United (2011) et d’American Airlines-US Airways (2013). Les premiers grands rapprochements de compagnies en Europe (Air France-KLM, Groupe Lufthansa…) ont plutôt été motivés par l’apparition soudaine de belles opportunités, à l’instar de ce que s’apprêtait à faire IAG sur la compagnie espagnole Air Europa avant le déclenchement de la pandémie.
Et évidemment les effets de la pandémie sur le transport aérien européen ont constitué un véritable séisme pour les opérateurs, avec de nombreuses compagnies aériennes qui n’auraient pas survécu bien longtemps aux restrictions de voyages sans bénéficier d’aides publiques. Ces compagnies vont d’ailleurs être bientôt la cible logique des compagnies low-cost qui redémarreront plus fort avec la reprise, par définition, et qui vont très certainement à nouveau subir sur le point à point, malgré le renforcement de leur propre activité à bas coût sur ce segment (Transavia, Eurowings, Vueling, BA Euroflyer…). Renforcer ses marges par des processus de fusion et acquisition, qui réduisent le nombre d’acteurs et donc la concurrence (avec une augmentation induite des prix pour les passagers) est donc une très bonne piste.
Reste maintenant à savoir avec quel argent et surtout avec quelle position de la Commission européenne, alors que certaines grandes compagnies aériennes comme Air France n’entendent (ou ne peuvent) pas rembourser la totalité des aides perçues avant 2025. On entend pourtant quelques rumeurs en France pour un regain d’intérêt pour Air Europa et même pour TAP, avec son puissant réseau africain et sud-américain.
Quoi qu’il en soit, une nouvelle vague de fusions et acquisitions chez les compagnies aériennes en Europe n’est qu’une question de temps…

