Très fragmenté, le marché africain est à la merci des compagnies des autres continents. Le CEO d’Ethiopian Airlines, Tewolde Gebremariam, explique que 82% du marché du transport aérien est non africain. « Cela doit changer. L’espace aérien africain est davantage ouvert aux compagnies non africaines qu’aux compagnies africaines. Tant que nous sommes sur un pied d’égalité, ce n’est pas un problème majeur, sinon c’est injuste. »
Or cette égalité n’existe pas. Dans une interview accordée à l’IATA le 8 juillet, il poursuit en effet : « le carburant est plus cher, les taxes sont élevées et la plupart des infrastructures est en mauvais état. Opérer dans cet environnement est différent et difficile. Tout cela pour dire que le marché n’est pas naturellement égalitaire. Une compagnie hors du continent ne fait face à ces difficultés que sur ses routes africaines. Nous y faisons face sur toutes nos routes. »
Associés au protectionnisme des Etats africains, ces obstacles limitent le nombre de routes intra-africaines – elles sont 719 selon une étude du magazine Flight International publiée en mai 2013. Cependant, le réseau africain se structure de mieux en mieux autour des hubs établis par Royal Air Maroc à Casablanca, par Egyptair au Caire, par Ethiopian Airlines à Addis Abeba, par Kenya Airways à Nairobi et par South African Airlines à Johannesburg.
Mais en l’absence d’un réseau intérieur dense et comme l’a maintes fois regretté Tony Tyler, le président de l’IATA, il reste encore souvent plus facile de passer par l’Europe pour voyager d’un point à un autre de l’Afrique.
Pour des raisons historiques, les compagnies européennes sont en effet très présentes sur le continent. Selon une analyse publiée par Aviation Week en mai 2013, seules quatre des dix plus importantes compagnies entre l’Afrique et l’Europe sont africaines, la première, Royal Air Maroc, ne faisant son apparition qu’à la cinquième place. Air France court en tête avec 921 millions de sièges offerts, suivie de loin par British Airways, KLM ou Lufthansa.
L’Union européenne est parfois accusée, notamment par l’AFRAA (African Airlines Association), d’avoir établi la liste noire des compagnies aériennes en partie pour que les compagnies communautaires puissent conserver leur mainmise sur le marché. Une vaste majorité des compagnies aériennes africaines y figurant, elle leur interdit de lancer des vols vers l’Europe. La liste noire contribue également à endommager la réputation des compagnies africaines, « y compris celles avec d’excellents niveaux de sécurité », indique Tony Tyler.
De nouvelles concurrentes sont également apparues ces dernières années : Turkish Airlines et les compagnies du Golfe. Ces compagnies, puissantes et à même de surpasser les difficultés inhérentes au marché africain, rencontrent un succès d’autant plus rapide qu’elles sont idéalement positionnées pour les vols vers la Chine. Le pays est en effet devenu le principal allié économique du continent africain.
Mais, aucune compagnie chinoise ne desservant aujourd’hui le continent, Ethiopian Airlines, Egyptair, South African Airlines et Kenya Airways sont les plus grandes opératrices de ces liaisons vers la Chine. Sur ce marché au moins, les compagnies africaines ont la primeur.
