L’AESA « aura beaucoup de mal à assurer toutes ses missions en 2015 », selon Patrick Ky, son président. En cause, les restrictions budgétaires appliquées par l’Union Européenne et la crise économique au niveau des Etats-membres qui risquent toutes d’entraîner un manque de ressources.
Patrick Ky explique que l’Europe s’est fixé comme objectif de réduire de 5% ses effectifs et qu’elle l’applique aveuglément à toutes ses agences. Le risque est que l’AESA ne soit pas capable de faire face au pic de production attendu en 2015, ce qui entraînerait des retards dans la certification des appareils européens et « inquiète les industriels ».
Il s’est toutefois montré rassurant pour le programme A350 : « la certification se passe très bien. Sauf catastrophe, nous sommes capables de tenir les engagements en termes de date. » Il précisait en novembre dernier que la certification devrait intervenir en juin 2014.
Cependant, une autre menace plane, qui vient directement des Etats : le manque de ressources nationales affectées à la sécurité aérienne. Patrick Ky indique que la crise économique a « un impact sur la capacité nationale à intervenir sur la sécurité aérienne. »
L’Allemagne est ainsi l’un des pays posant les plus importants problèmes concernant ces ressources. Le Luftfahrt Bundesamt (LBA) dispose de 400 inspecteurs et aurait besoin d’au moins 250 personnes supplémentaires – des recrutements qui ont été imposés par l’agence européenne. Dans ces pays, l’AESA fait ses propres inspections. A l’opposé, la France est un « pays plutôt riche en termes de ressources » qui emploie 1 200 inspecteurs. Patrick Ky appelle à davantage de solidarité entre les pays, qui devraient s’unir dans ce domaine – ainsi que dans celui des bureaux d’enquêtes accidents.
Le cas du C919
Le président de l’AESA a indiqué que l’agence européenne avait une bonne vision des programmes européens sur cinq ans, qui lui permet d’évaluer ses besoins. C’est dans ce cadre qu’il a évoqué le cas de l’aviation chinoise, dont les programmes sont beaucoup plus incertains. La COMAC maintient que le C919 sera certifié en 2015 mais « personne n’y croit ». Par ailleurs, le monocouloir chinois, destiné à concurrencer les Boeing 737 et Airbus A320, va demander un niveau de ressources très important en vue de sa certification, « le double que ce que l’on consacrerait à un avion équivalent produit en Europe. »
Vers une extension des prérogatives de l’AESA ?
Malgré un budget serré et ce problème de ressources, l’AESA réfléchit à étendre son domaine d’influence à deux secteurs : la sûreté – « car les problèmes liés à la sûreté sont liés à la sécurité » – et les aéronefs gouvernementaux et militaires. Pour ces deniers, Patrick Ky reconnaît que le sujet est délicat. Mais le pas a déjà été franchi avec l’A400M puisque l’avion de transport militaire a d’abord été certifié civil par l’AESA avant que chaque Etat certifie ce qui relève de ses systèmes de mission. Il espère que le dossier avancera lors du sommet sur l’Europe de la défense en juillet prochain.