Le véritable détournement politique du 737-800 de Ryanair par la Biélorussie est un événement très grave qui va marquer durablement le transport aérien mondial. Bien sûr, l’impact des nouvelles restrictions de vols visant à éviter l’espace aérien biélorusse va avoir un impact significatif pour les compagnies aériennes de la région ou pour certaines liaisons long-courriers entre l’Europe de l’Ouest et l’Asie, avec des temps de vol plus longs, synonyme d’augmentation de consommation de carburant, et parfois même, de mise en place d’équipages techniques renforcés pour respecter la législation quant à la fatigue.
Le survol de certaines zones frontalières avec la Russie était déjà très réglementé depuis des années, par exemple à l’est de l’Ukraine, au Donbass, ou au-dessus de la Crimée, et les récentes annulations de plans de vol de la part de Rossaviatsia, l’agence fédérale de l’aviation russe, même si dues à de simples « questions techniques », ne sont pas pour rassurer pour l’avenir.
Mais le plus grave n’est pas là.
Car en utilisant son espace aérien à des fins politiques, la Biélorussie s’est attaquée à un symbole, celui du droit aérien international mis en place en 1944 avec la Convention de Chicago. Toute compagnie aérienne a le droit de survoler un pays sans avoir l’obligation d’y atterrir. Le stratagème imaginé par les autorités biélorusses représente clairement une violation du droit qui pourrait représenter une menace sans précédent pour le transport aérien mondial s’il était mis en pratique par d’autres États de la planète pour des intérêts divers.
En dépit du contexte géostratégique actuel, la France, appuyée par plusieurs autres pays européens, s’est immédiatement tournée vers le Conseil de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) pour mettre la lumière l’enchaînement des faits et leur qualification juridique. Les premiers résultats de l’enquête sont attendus d’ici à la fin du mois de juin et visent à déterminer si la Biélorussie a bafoué la Convention de Chicago, et à en tirer durablement les conséquences.
Le transport aérien mondial est déjà noyé dans les incertitudes liées aux restrictions de voyages depuis quinze mois. Il n’avait vraiment pas besoin d’en ajouter de nouvelles.