Boeing et EADS s’enracinent en Inde, faisant du pays des Maharadjahs leur nouveau champ de bataille. Désirant tous deux contribuer au développement de l’industrie aéronautique et en tirer profit, les constructeurs américain et européen ont chacun décrit le 29 août leurs plans d’emménagement. Celui-ci passera par la construction de centres industriels, un centre de maintenance pour Boeing et un complexe aéronautique pour EADS.
Un projet parfaitement défini chez Boeing
Boeing a choisi la ville de Nagpur, située en plein cœur de l’Inde, dans l’Etat du Maharashtra, et théâtre de nombreux investissements publics et privés. Le secteur aéronautique y est en pleine expansion et l’aéroport fait partie intégrante du projet de modernisation des infrastructures aéroportuaires lancé par le gouvernement en février dernier.
Cette décision est attendue depuis un certain temps. Elle émane en effet d’un arrangement conclu avec le gouvernement indien lors de la signature d’une commande de 68 appareils (B777, B787 et B737) par Air India en décembre 2005. L’ouverture du centre de maintenance représente un investissement de 100 millions de dollars de la part du constructeur américain et s’accompagne de l’établissement d’un centre de formation.
EADS prêt à prendre le marché d’assaut
Quant à EADS, il voit les choses en grand. Le groupe a créé cette année EADS India Private, une filiale destinée à conduire le développement des infrastructures aéronautiques et des capacités industrielles du pays, ainsi que celui du consortium. Il entend bien générer un volume d’investissement de 2 milliards d’euros (2,6 milliards de dollars) sur quinze ans.
L’essence du projet réside en l’édification d’un centre de technologie, un complexe rassemblant les filiales d’EADS et leurs partenaires indiens et dont les activités seront basées sur les services d’ingénierie et les technologies de l’information. Sa location n’a pas encore été choisie mais il devrait être opérationnel à partir du deuxième trimestre 2007 puis tourner à plein régime lors de son inauguration officielle au début de l’année 2008. Son ouverture pourrait créer jusqu’à 2.000 emplois.
Parmi toutes les installations qu’il comprendra, le centre d’ingénierie d’Airbus India sera le plus important. Il entrera en service sur un site temporaire dès la première moitié de l’année 2007 pour réaliser des analyses finales d’ingénierie et de design, en collaboration avec les fournisseurs indiens.
Face au recours de plus en plus fréquent des constructeurs à la sous-traitance, EADS a également décidé d’ouvrir des bureaux de sourcing à New Delhi et Bangalore. Ils seront opérationnels prochainement, à la fin de l’année, et s’occuperont donc de rechercher et évaluer les fournisseurs selon les besoins des entreprises clientes.
Une expansion trop rapide
Les deux constructeurs sont donc tous deux dans les starting blocks, prêts à saisir la moindre occasion de prendre pied sur ce marché en pleine expansion. Dans leurs analyses respectives, Boeing et EADS prévoient un besoin compris entre 856 et 960 appareils dans les vingt années à venir, Boeing venant de revoir ses prévisions à la hausse cette semaine pour les multiplier par deux.
L’Inde a connu une augmentation de 25% de son trafic passager de 2004 à 2005, 73 millions de voyageurs ayant été recensés entre mars 2005 et mars 2006. La plupart d’entre eux, 70%, sont restés sur le réseau domestique. Ce dynamisme du secteur de l’aviation est dû, selon Boeing, à la croissance économique actuelle du pays et la libéralisation du secteur. Dans ce contexte, plusieurs compagnies ont vu le jour ces dernières années, majoritairement des low-costs comme Air Deccan, GoAir ou Air Sahara.
Cependant, l’Inde n’a pas eu le temps d’adapter ses infrastructures à cette explosion des compagnies privées. En plus de la congestion des voies aériennes domestiques et du manque imminent de pilotes, les aéroports sont dans un état critique, aussi bien du point de vue de l’entretien des pistes et des terminaux que de celui de leur capacité. Le gouvernement a donc été obligé de lancer d’urgence un vaste programme de modernisation. Celui-ci a commencé avec la privatisation des plateformes de New Delhi et Bombay, ceux de Chennai et Calcutta étant susceptibles de suivre la même voie. 35 autres aéroports figurent sur la liste du gouvernement. Le ministre de l’Aviation Civile, Praful Patel, a donc tout intérêt à exploiter la convoitise que son pays éveille chez les grands constructeurs et profiter de leur volonté de soutenir le développement du secteur aéronautique indien.