Particulièrement fragilisée par la crise liée à la pandémie, fustigée par les militants écologistes au profit du train, et finalement de l’automobile, l’aviation régionale a bien souffert ces derniers temps. C’est pourtant aussi sur les vols de courte distance que l’aviation va avoir un important rôle à jouer lors de la reprise, avec une succession de révolutions qui commencent à se bousculer à l’horizon.
Car seule l’aviation régionale est capable de maintenir et créer de la connectivité de façon durable et abordable sur certains marchés, avec des fréquences qui ne peuvent être financièrement rentables pour les compagnies aériennes low-cost. On le sait, le trafic intérieur, ou de courte distance, est celui qui sera amené à redécoller le plus rapidement de par le monde, avec de nouvelles opportunités de liaisons point-à-point en dehors des grands hubs, mais aussi sur des lignes abandonnées par de grandes compagnies aériennes traditionnelles condamnées à l’attrition, même depuis leur base.
C’est un fait, la « jet mania » de l’aviation régionale touche à sa fin. Il faudra désormais véritablement compter sur des avions plus sobres sur tous ses segments de marché, en particulier sur les appareils de plus de 50 places. L’avion turbopropulsé consomme deux fois moins de carburant et produit la moitié des émissions d’un jet régional de même capacité.
ATR l’a bien compris et se retrouve désormais seul sur ce segment, une position qui suscite sérieusement la convoitise d’Embraer au Brésil, avec une annonce importante qui devrait se matérialiser dès l’année prochaine. L’avionneur franco-italien commence déjà à préparer la riposte, par exemple avec cette nouvelle version du PW127 « extra time » dévoilé à Dubaï qui permet de sauter une visite des moteurs en atelier sur 10 ans, synonyme de réduction des coûts, de plus grande disponibilité des flottes, et donc de recettes. Les avions ATR seront aussi compatibles à 100% de carburéacteurs durables d’ici 2025, avec à la clé une réduction des émissions carbone de plus de 80%. Et d’autres améliorations sont certainement dans les cartons, par exemple au niveau des hélices. Le motoriste Pratt & Whitney Canada travaille par ailleurs avec De Havilland Canada pour intégrer la technologie hybride électrique sur un DHC-8-100, une piste technologique qui pourrait permettre de réduire de 30% la consommation par rapport à un turbopropulseur n’utilisant que du carburant.
Du côté des piles à combustible, les annonces se font aussi toujours plus ambitieuses chez ZeroAvia ou chez Universal Hydrogen ces dernières semaines, avec des projets de conversions visant par exemple l’ATR 72 pour la seconde moitié de la décennie. Les deux concurrents multiplient les accords, tant du côté des plateformes susceptibles d’être modifiées que du côté de potentiels futurs opérateurs. ZeroAvia parie même sur une première liaison régulière internationale zéro émission entre l’aéroport de Rotterdam-La Haye et Londres en 2024 avec un Do228 de 19 places. Reste que le mur technologique de l’avion à hydrogène n’est assurément pas encore franchi, et encore moins pour les appareils de la catégorie CS-25.
Beaucoup de choses vont donc s’écrire d’ici la fin de la décennie, aussi bien pour les petits commuters que pour les avions de plus grande capacité. Et si les toutes prochaines années semblent déjà décisives quant aux choix technologiques, la renaissance du transport aérien régional s’annonce déjà acquise.