Les opérateurs européens d’avions de moins de 100 places sont progressivement en train de sortir la tête de l’eau après deux années particulièrement difficiles directement liées aux conséquences de la pandémie, mais de nouvelles menaces planent encore sur un modèle économique pourtant vital pour assurer la connectivité de nombreux territoires du continent.
Avec un carburéacteur coté à plus de 1200 dollars la tonne ces derniers jours, avec une feuille de route de la Commission européenne qui pourrait conduire à sa taxation dans le cadre du paquet « Fit for 55 », les compagnies régionales ne peuvent clairement pas encore avoir une vision claire de ce qui les attend dans les prochains mois ou les prochaines années.
L’aviation régionale européenne sort cependant de la crise mieux armée, souvent plus légère financièrement, avec une profonde maîtrise de ses coûts (hors carburant) et de ses capacités. Les transporteurs sont très majoritairement restés dans le giron des grandes compagnies aériennes du continent, avec un très faible nombre de projets d’acquisition d’avions de nouvelle génération pour moderniser leur flotte, pour l’instant. On regardera bien sûr ce que prévoit de faire Air France pour sa filiale HOP dans les prochains mois, avec cette potentielle commande de 35 à 50 Embraer 190-E2 conditionnée à un nouvel effort de productivité des salariés. Le grand remplacement des flottes n’est cependant pas encore là, au grand dam des deux seuls grands OEM encore présents sur le marché, à savoir ATR et Embraer.
Étonnement, le modèle des CPA (Capacity Provider Airline) très développés aux États-Unis a toujours du mal à s’implanter sur le vieux continent, une solution qui a pourtant fait ses preuves pour réduire les coûts opérationnels des compagnies aériennes régionales, à condition que ces nouveaux opérateurs atteignent évidemment une taille suffisamment importante. A plus petite échelle, des opérateurs tirent cependant leur épingle du jeu, à l’instar d’Amelia qui vient tout juste de lancer ses premières liaisons européennes en régulier depuis Strasbourg, la compagnie française restant aussi un important fournisseur d’avions régionaux en ACMI, par exemple pour Air France.
Les opérateurs d’avions régionaux continueront malheureusement d’être particulièrement critiqués par les écologistes en herbe en Europe, au regard de la distance parcourue sur certaines lignes, alors que de nombreux opérateurs continuent pourtant d’un autre côté à assurer des vols pour les grandes compagnies aériennes traditionnelles, en replacement de monocouloirs devenus trop capacitaires sur certaines lignes. En attendant les SAF et le remplacement des flottes, il faudra certainement encore redoubler d’efforts pour apaiser les politiques environnementales des gouvernements et les écologistes, en communiquant sur les améliorations des opérations conduisant à la réduction de la consommation en carburant, voire sur les projets d’avions zéro émission (piles à combustible, hydrogène), même si l’arrivée de ces types d’appareils en catégorie CS-25 reste réalistiquement encore trop nébuleux.
En attendant, l’aviation régionale européenne est clairement sur la réserve, mais elle continue toujours de proposer des alternatives de connectivité parmi les plus efficientes et les plus rentables du continent.