L’annonce de la création d’Aero Engine Corporation of China (AECC) par le président chinois Xi Jinping à la fin du mois d’août est incontestablement un nouveau signe des ambitions aéronautiques de l’Empire du Milieu. Cette nouvelle entreprise publique, qui regroupe les savoir-faire d’AVIC et de Comac dans la propulsion, disposerait déjà d’un capital de 50 milliards de yuans (6,71 milliards d’euros) pour permettre à la Chine de rattraper son retard sur les motoristes occidentaux ou russes.
Car ce n’est un secret pour personne, le retard est important. Les premières images des démonstrateurs d’avions furtifs chinois, aussi bien le J-20 de Chengdu Aircraft Corporation que le J-31 de Shenyang Aircraft (photo), tout comme d’ailleurs aussi l’avion de transport Y-20 de Xian Aircraft, ont été particulièrement révélatrices au regard des observateurs avertis : ces programmes sont largement pénalisés par leurs motorisations.
Pour de nombreux spécialistes, la Chine mettra entre 15 et 20 ans pour rattraper le gros de son retard dans la propulsion militaire, le chemin restant encore beaucoup plus long sur les réacteurs civils, marché concurrentiel oblige. Bien sûr, AECC s’intéressera à toutes les nouvelles technologies qui occupent déjà les motoristes occidentaux, à l’instar des aubes de soufflante en matériaux composites, aux composites à matrice céramique (CMC), aux alliages d’aluminure de titane ou aux nouvelles architectures avec réducteur (GTF). La Comac s’était d’ailleurs engagée à proposer une motorisation chinoise sur le C919 avec le CJ-1000A, un réacteur qui pourrait voir le jour d’ici dix ans.
Car en plus des performances qui se doivent d’égaler celles proposées par les motoristes occidentaux, il faudra aussi atteindre une fiabilité qui n’a été rendue possible que par l’accumulation de données sur des décennies d’opérations. Il n’est pas rare de voir des réacteurs comme le CFM56 totaliser des dizaines de milliers d’heures de vol sans aucune dépose, l’équivalent de près de 10 ans de fonctionnement. Par ailleurs, un pilote sur huit seulement vivra peut-être une avarie moteur nécessitant son extinction durant toute sa carrière. Voilà où sont les standards de l’industrie aujourd’hui. C’est sans compter non plus les efforts de R&D des principaux motoristes, largement autofinancée.
On l’aura compris, aussi ambitieuse soit-elle, la Chine ne pourra sérieusement prétendre à rivaliser avec les motoristes occidentaux avant la seconde moitié du siècle. Mais pour reprendre une citation célèbre de Confucius, « qui ne progresse chaque jour, recule chaque jour ».

