C’est sous la quiétude des jours d’été que se tient le grand salon aéronautique international de Farnborough cette semaine, premier événement majeur du secteur depuis le début de la pandémie de Covid-19 en 2020. Le salon britannique intervient d’ailleurs pour la première fois en dehors de l’Union européenne, conséquence du retrait fracassant du Royaume-Uni il y a 18 mois. Fort heureusement, la filière aéronautique européenne a su s’adapter à cette nouvelle réalité bien en amont, alors que le contexte mondial amenait, quelques mois seulement plus tard, à de bien plus grandes difficultés pour les industriels avec l’arrêt brutal du trafic aérien mondial.
Nous n’en sommes fort heureusement plus là et la cuvée 2022 de Farnborough sera surtout le symbole du redécollage de l’aéronautique, civile comme militaire, même si il ne faudra évidemment pas s’attendre à un record d’annonces de commandes d’avions commerciaux comme lors des précédentes éditions, loin de là. C’est d’abord un grand salon de retrouvailles entre professionnels, dans une dynamique de reprise générale, avec plus d’un millier d’exposants, même si des contrats sont évidemment dans les cartons des OEM depuis quelques mois, avec des négociations qui étaient encore de mises lors de la dernière AGM de l’IATA le mois dernier.
On surveillera en particulier les annonces des programmes Airbus A220, A320neo et celles pouvant concerner le nouvel A350F qui entamera son premier véritable baptême du feu dans un salon majeur face au 777-8F. Boeing est évidemment toujours dans une situation délicate, en particulier sur ses gros-porteurs de transport de passagers, mais ce n’est de toutes les façons sur ce segment qu’il faudra attendre d’importantes annonces. Les livraisons de 737 MAX peinent encore, mais la nouvelle génération de monocouloirs de l’avionneur américain pourra aussi profiter du faible nombre de créneaux disponibles chez son concurrent européen durant les quatre à cinq prochaines années. On surveillera aussi les loueurs, dont la part dans la flotte mondiale ne cesse évidemment d’augmenter, et la part des lettres d’intention d’achats émanant des opérateurs, toujours dans une situation financière assez délicate quand ils n’ont pu bénéficier d’un soutien étatique. On observera aussi attentivement le désir de renouvellement des flottes des opérateurs tout cargo, que ce soit par l’acquisition d’avions neufs ou par des conversions P2F.
L’aviation militaire n’est évidemment pas en reste, compte tenu de la situation géopolitique actuelle, dans un contexte d’augmentation durable des budgets de défense pour de nombreux nombreux pays, que ce soit avec le conflit en Ukraine ou avec les tensions croissantes en mer de Chine méridionale ou au Moyen-Orient. À noter que les industriels russes ont été totalement bannis du salon de Farnborough pour cette édition, conséquence directe des mesures de rétorsion en vigueur en Occident.
Mais le salon aéronautique de Farnborough se tient aussi cette fois sous une vague de chaleur record pour la région de Londres, ce qui ne manquera pas d’alimenter encore davantage les attaques des écologistes contre le transport aérien. Cela tombe bien, les industriels ont clairement l’intention de profiter de la caisse de résonance du salon auprès des médias pour montrer que des multiples initiatives sont déjà menées pour de décarboner l’aviation et respecter les objectifs extrêmement ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2050 (net zéro). Et Farnborough va clairement montrer que sur ce point, les deux rives de l’Atlantique sont exactement sur la même longueur d’onde.