La récente explosion d’un missile balistique intercontinental Sarmat (SS-X-30) dans son silo à Plesetsk laissera sans doute des traces dans l’industrie de défense russe, tant le sujet est évidemment stratégique.
Le successeur du déjà très imposant SS-18 Satan était déjà très en retard sur son calendrier de déploiement, avec toutes les difficultés techniques que cela peut engendrer au regard de sa propulsion liquide pour prolonger sa durée de vie. Cette explosion n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de l’ICBM américain LGM-25C Titan II à Damascus (Arkansas) en 1980, à la suite d’une fuite d’ergols.
Mais voilà, le fleuron de la dissuasion russe, capable d’emporter jusqu’à une quinzaine de têtes nucléaires mirvées dans un rayon d’action de 18000 km, en est au moins à son troisième échec, avec un seul tir réalisé avec succès en avril 2022. Nous sommes très loin des ambitions de Vladimir Poutine affichées depuis mars 2018 avec le lancement des nouvelles « Super-armes » comme le planeur hypersonique Avanguard, le missile hypersonique Kinjal, le drone-torpille nucléaire Poseïdon ou encore le missile de croisière à propulsion nucléaire Bourevestnik.
L’ICBM américain Minuteman III, seule composante terrestre de la triade nucléaire américaine aujourd’hui (en attendant l’arrivée du très coûteux LGM-35 Sentinel dans quatre ans) a pourtant lui aussi connu un certain nombre d’échecs lors de tirs d’essais ces dernières années, même s’il est à relativiser compte tenu du grand nombre d’exemplaires déployés (au moins 400 en alerte) et de ces nombreux tirs réussis (le dernier le 4 juin).
Les mauvaises langues diront que la Russie n’est plus capable de créer un missile de cette envergure sans l’aide de l’Ukraine (le SS-18 était conçu par PivdenMach à Dnipro), que l’embargo sur certains composants occidentaux rend bien difficiles les nouveaux projets russes, que sa filière spatiale est gangrénée depuis des lustres par des détournements de fonds…
Mais les connaisseurs n’iront pas jusqu’à douter de la crédibilité de la dissuasion nucléaire russe, qui repose sur une multitude de vecteurs, et en particulier sur ses 12 SNLE et sur ses 11 sous-marins lance-missiles à propulsion conventionnelle.
Restons sur terre…