La vente de la division Transport à Alstom, finalisée le 29 janvier, vient clore un chapitre long de plus de quatre ans durant lequel le groupe Bombardier a lentement puis résolument glissé de son piédestal. Payant une ambition qui s’est avérée trop dévorante pour lui, le groupe a été démantelé en quelques mois jusqu’à ne garder que l’activité aviation d’affaires, qu’il a choisie pour être son coeur de métier, et les services associés.
Quatre ans, c’est le temps qu’il aura fallu pour défaire un conglomérat bâti rachat après rachat depuis les années 70, période durant laquelle les activités se sont diversifiées des motos-neige vers le ferroviaire puis vers l’aéronautique à partir des années 80 lorsque Bombardier a mis la main sur Canadair et Learjet puis de Havilland Canada.
Les années 2010 auront été fatales. Le programme CSeries, réfléchi dès 1998, ressorti des tiroirs en 2005 et officiellement lancé en 2008, aura précipité la perte de Bombardier. Les difficultés de développement du monocouloir de nouvelle génération ont coûté très cher à l’avionneur et la guerre des prix qu’Airbus et Boeing ont menée pour protéger le bas de leur gamme d’avions de la témérité du nouvel entrant sur ce marché des avions de 110 à 150 places a bloqué les ventes de l’appareil. Le groupe menait également de front le développement de deux autres programmes : le Learjet 85 (abandonné début 2015) et le Global.
Exsangue malgré un soutien financier du Québec, Bombardier s’est résolu à vendre coup sur coup l’activité hydravions (CL-215 et CL-415) à Viking (2016), puis la CSeries à Airbus (2017), le programme Q400 à Longview Aviation (2018), le CRJ à Mitsubishi (2019), son activité Aérostructures à Spirit (2019), celle de câblage à Latécoère (2019) puis sa division ferroviaire à Alstom. Son chiffre d’affaires, qui avait atteint 20,1 milliards de dollars en 2014, va ainsi être divisé par trois – en 2019, l’activité Aviation d’affaires représentait 6,3 milliards de dollars de recettes.
Devenu un pure player, avec les dangers de cela comporte, Bombardier va désormais jeter toutes ses forces dans l’aviation d’affaires – avec un carnet de commandes de 12,2 milliards de dollars au 30 septembre 2020 – et les services. Mais le chemin du redressement n’est pas dénué d’obstacles. Il lui faut encore réduire sa dette, qui avoisinait 4,7 milliards de dollars au 31 décembre 2020. Et alors que la concurrence ne faiblit pas avec quatre grands acteurs en face (Textron, Gulfstream, Embraer et Dassault), la crise sanitaire n’arrange rien : elle l’a contraint à ajuster sa production et devrait entraîner une baisse des livraisons de 30% en 2020 ainsi que des prises de commandes.