Les résultats financiers trimestriels des principales compagnies aériennes tombent les uns après les autres et une tendance de fond se dégage clairement. Dans l’ensemble, les principaux acteurs de l’aérien basés en Amérique du Nord, en Europe et au Moyen-Orient sont bien partis pour dégager une rentabilité record cette année, alors que le niveau de trafic est, grosso modo, revenu à son niveau prépandémique.
Le troisième trimestre est évidemment traditionnellement le plus rentable, avec des avions pleins durant la période estivale. Mais les compagnies aériennes bénéficient aussi toujours de la hausse généralisée des prix des billets d’avion qui, jusqu’ici, n’a pas vraiment freiné au remplissage de leurs appareils. Mieux, les classes affaires affichent encore des taux de remplissage particulièrement élevés, alors qu’en même temps les entreprises continuent à se serrer la ceinture, avec l’aide des nouveaux outils de travail collaboratifs et autres plateformes de visioconférence.
Cependant, la réception des marchés face aux derniers résultats exceptionnels du groupe Air France-KLM (bénéfice d’exploitation de 1,3 milliard d’euros) ou à ceux du groupe IAG (1,745 milliard d’euros) en dit long aussi sur un certain manque de visibilité à plus long terme pour le secteur du transport aérien. Car les coûts des compagnies aériennes ont aussi plutôt progressé ces dernières années, alors qu’en face certaines menaces planent, comme celle d’une possible récession en Europe ou celle d’une nouvelle hausse du carburant pouvant résulter d’un conflit au Moyen-Orient. Les derniers résultats des grands groupes logistiques et des compagnies aériennes cargo ne sont d’ailleurs pas pour rassurer ces derniers mois.
Mais un autre facteur important est à prendre en compte et provient directement des difficultés de la chaîne d’approvisionnement pour la production d’avions commerciaux en nombre suffisant, des tensions persistantes qui touchent finalement tous les acteurs de la filière industrielle, mais qui dans une certaine mesure sont en train de protéger bon nombre de compagnies aériennes face aux risques de surcapacité.
Les retards de livraisons de centaines d’appareils depuis des mois ne font pas que les mauvaises affaires des opérateurs, d’autant qu’une partie non négligeable des avions qui devaient être remplacés devaient à leur tour participer au lancement de nouvelles start-ups, souvent sur le modèle des compagnies low-cost, et de toute façon destructrice de valeurs pendant un temps plus ou moins long.
Il y a quelques mois, l’IATA n’anticipait pas d’améliorations significatives au niveau des capacités des compagnies aériennes avant 2025 au plus tôt face aux déboires des deux grands avionneurs mondiaux, ce qui limitera de fait leur croissance, mais bien entendu pas nécessairement la demande.
Le transport aérien est peut-être finalement en train de vivre un nouvel âge d’or, tout du moins sur le plan de la rentabilité, et c’est vraiment loin d’être anodin. Car pour la petite histoire, le milliardaire américain Warren Buffett s’était même interrogé pour savoir si tout capitaliste un peu censé n’aurait pas dû abattre l’avion des frères Wright à Kitty Hawk il y a 120 ans pour préserver le monde des affaires, tant le transport aérien a été synonyme de très faibles rendements financiers depuis son existence…

