Le projet d’avion gros-porteur long-courrier chinois avance, malgré le retrait de la participation de la Russie l’été dernier, conséquence collatérale de la guerre en Ukraine.
Désormais rebaptisé C929 par COMAC (Commercial Aircraft Corporation of China), son appellation d’origine, le programme a discrètement conclu sa phase de conception préliminaire pour celle de la conception détaillée entre les mois de septembre et octobre derniers, dixit le vice-président de l’avionneur début novembre.
Son entrée en service reste d’ailleurs toujours ambitieuse, à horizon 2030 (seulement cinq ans de retard par rapport à son calendrier initial), mais l’avionneur chinois demeure encore particulièrement nébuleux en ce qui concerne ses caractéristiques et ses performances. On sait simplement qu’il pourra transporter entre 280 et 400 passagers pour une distance franchissable de l’ordre de 12000 km. Difficile de dire donc si COMAC entend positionner son futur gros-porteur face à l’A330, à l’A350 ou tout simplement un peu face aux deux.
Ce qui est sûr, c’est que COMAC veut aller vite sur ce programme qui s’annonce bien plus ambitieux que l’actuel moyen-courrier C919, en témoigne l’annonce de la première livraison d’une section centrale du fuselage programmée avant septembre 2027, un sous-ensemble attribué à la jeune entreprise Huarui Aerospace Manufacturing Co. qui est en train de se doter de moyens industriels conséquents dans la région d’Hangzhou, notamment grâce à l’aide de certains industriels allemands spécialisés dans l’usine 4.0.
Pour l’instant, aucun motoriste ou équipementier occidental n’est officiellement monté à bord du futur gros-porteur chinois qui ambitionne donc de commencer à mordre dans les perspectives de ventes d’Airbus et Boeing dans l’Empire du Milieu au cours de la prochaine décennie, même à très faible cadence. Le motoriste Aero Engine Corporation of China (AECC) planche bien sur un moteur de forte puissance (tout comme pour le CJ-1000A du C919 qui vise à se substituer un jour au LEAP-1C de CFM International), mais sera-t-il prêt à respecter la feuille de route ambitieuse de COMAC ?
Le gel de la configuration finale du C929 débouchera logiquement bientôt sur une sélection précise de tous les systèmes et équipements qui viendront rendre possible l’existence même du programme. Mais quand on constate les pressions monumentales de la Chine sur l’industrie automobile américaine et européenne, la façon dont l’industrie ferroviaire chinoise tente de rentrer sur le Vieux Continent, voire comment la CAAC pousse depuis quelques mois l’EASA à faire certifier le C919 pour crédibiliser davantage le programme au niveau mondial (et apprendre du savoir-faire technique des grands régulateurs), la raison voudrait que l’on commence sérieusement à mettre la priorité sur les enjeux à long terme, sur une certaine protection de l’industrie aéronautique civile européenne qui reste l’un des rares contributeurs positifs dans la très forte dégradation de la balance commerciale de l’UE avec la Chine.
En clair, l’Occident doit-il se montrer un peu moins naïf face au futur gros-porteur C929 de COMAC ?
