ATR n’a pas manqué le rendez-vous du Bourget. L’avionneur franco-italien a profité du salon actuellement en cours pour dévoiler ses nouvelles prévisions de marché sur vingt ans, mais surtout pour annoncer qu’Air Tahiti avait choisi d’installer son nouveau produit premium HighLine sur l’un de ses appareils et qu’il avait une nouvelle opportunité de pénétrer le marché américain grâce cette fois à la compagnie charter publique JSX.
ATR revient aux Etats-Unis et y introduit HighLine
Cette dernière annonce est peut-être la plus emblématique pour l’avionneur, le marché américain lui étant longtemps resté hermétique – pour le transport de passagers. Seule Silver Airways avait sauté le pas en 2019 et avait exploité quatorze appareils pour le transport de passagers, jusqu’à sa faillite le 11 juin dernier. Avec JSX, le retour d’ATR se fait de façon particulière. Il commence doucement déjà, puisque JSX débutera avec deux ATR 42-600 acquis en leasing. Ils seront mis en service dès cette année. Conformément à son modèle économique de vols semi-privés, la compagnie américaine a choisi une configuration HighLine pour ses appareils et proposera une cabine de trente places. Elle compte également proposer une connectivité avec Starlink.
Cependant, JSX comme ATR espèrent davantage. Ils ont donc signé une lettre d’intention portant sur l’intégration de jusqu’à 25 ATR dans la flotte de la compagnie texane – quinze fermes et dix options. Elle pourra au besoin choisir l’ATR 42-600 ou l’ATR 72-600. Dans les deux cas, elle adoptera une configuration HighLine dans ses cabines, avec trente fauteuils premium ou affaires.
Alex Wilcox, le directeur général de JSX, souligne que les ATR permettront à la compagnie d’atteindre plus d’un millier d’aéroports, jusqu’alors inaccessibles avec sa flotte d’Embraer 134 et 145. Des aéroports qui n’étaient alors desservis que par des vols privés. ATR abonde en son sens et souligne que 800 routes ont été abandonnées en vingt ans aux Etats-Unis, notamment par manque d’appareils adaptés à une desserte efficace, et qu’ATR a les moyens de restaurer cette connectivité perdue.

HighLine va également voler en Polynésie
Mais l’avionneur n’a pas imposé HighLine qu’aux Etats-Unis. Air Tahiti a en effet décidé de configurer l’un des quatre ATR 72-600 qu’elle a commandés en juillet 2024 avec le produit. Cet ATR 72-600 sera ainsi aménagé uniquement en classe affaires (avec des rangées de 1-1) et abritera 26 fauteuils Eterea de Geven – un fauteuil conçu pour ATR, offrant 21,6 pouces d’espace, un pitch de 39 pouces, une inclinaison de 7 pouces, une console, des rangements et des ports USB.
L’appareil entrera en service au second semestre 2026 à Bora-Bora et Raiatea. Il permettra à Air Tahiti de proposer un service affaires sur les vols domestiques, qui n’existait pas jusqu’alors et créait un vide dans l’expérience des voyageurs à la recherche de luxe. Sa mise en service s’accompagnera de celle d’un salon en aéroport et d’un parcours spécifique pour les passagers.


Une tendance positive avec des perspectives très intéressantes sur vingt ans
ATR a profité de ces deux belles annonces – qui ont suivi celle de sa plus importante commande depuis 2017 avec le contrat d’Uni Air dévoilé en amont du salon – pour faire un point sur les tendances de son marché. Nathalie Tarnaud-Laude, sa directrice générale, a indiqué deux autres commandes de clients restés anonymes avaient également été signée, pour onze ATR 72-600 au total, portant à trente le nombre d’appareils contractualisés depuis le début de l’année. Elle pense donc que les prises de commandes de 2025 devraient approcher celles de 2024 (56 appareils). En revanche, l’avionneur travaille toujours à la stabilisation de ses livraisons, perturbées par les problèmes dans la chaîne d’approvisionnement (petits fournisseurs d’aérostructures et trains d’atterrissage), tout en préparant une montée en cadence de la production à partir de 2026. Son objectif est de livrer environ soixante appareils par an durant les quatre prochaines années.
A plus long terme, les perspectives sont belles aussi. ATR dénombre 1 650 turbopropulseurs en service actuellement et estime que la flotte atteindra 2 585 appareils en 2044. Il faudra selon lui livrer 2 100 nouveaux appareils sur la période – 1 100 pour le remplacement d’appareils actuels et 880 pour la croissance. L’immense majorité de la demande devrait se tourner vers des appareils de 70 places : 1 690 appareils contre 410 pour des appareils de 50 places. Pourtant, ATR constate un regain d’intérêt pour l’ATR 42-600 qui l’incite à envisager une révision du mix de production à l’avenir, s’il se confirme.
Sans surprise, le marché le plus prometteur pour ce type d’appareils est le marché asiatique hors-Inde (835 appareils), suivi de l’Europe (360 appareils). Deux marchés intéressent particulièrement ATR, en tête desquels le marché indien. Pour le moment, l’avionneur estime le besoin dans le pays à 210 appareils, mais souligne qu’il s’agit d’une prévision prudente. Selon Alexis Vidal, le directeur commercial d’ATR, ce nombre pourrait bien être doublé. Actuellement, 70 ATR sont en service dans le pays. L’autre marché est celui de l’Amérique du Nord, qui a jusqu’à récemment laissé un trou béant sur la carte des exploitants d’ATR. Jusqu’à 255 turbopropulseurs pourraient entrer en service en Amérique du Nord et résoudre le problème de perte de connectivité évoqué plus haut. ATR a également commencé à s’imposer au Canada, où les appareils sont essentiels pour le désenclavement.
