« Tueur d’A330neo ». C’est en ces termes que se présente désormais le projet -5X de Boeing, dernière itération du NMA (New Midsize Airplane), un programme censé venir combler l’espace entre le futur 737 MAX 10 et l’actuel 787-8 dans la gamme de l’avionneur américain.
Ce qui a changé par rapport au projet initial c’est que Boeing n’entend plus du tout attaquer frontalement les nouvelles variantes de l’A321neo et en particulier l’A321XLR, ce segment de marché étant définitivement acquis à son concurrent depuis son lancement. Il faut dire que proposer un avion bicouloir pour venir occuper le bas de ce segment de marché était une hérésie, au regard du poids des investissements nécessaires, du temps pour sa mise sur le marché, ou du fait des promesses opérationnelles difficiles à tenir face au coût d’exploitation réduit d’un monocouloir.
La tactique de David Calhoun s’oriente maintenant vers un avion bien plus en cohérence avec son marché, un avion légèrement moins capacitaire que feu le NMA-7X (265 sièges – 4500 nautiques), mais avec une autonomie supérieure à 11 heures de vol. Il lui faudra aussi une section de fuselage capable d’accueillir au minimum 7 sièges de front en classe économique. Le projet -5X pourra ainsi prendre la place du 767 et venir s’emparer du remplacement des A330 d’Airbus, un marché qui va nécessairement monter en puissance d’ici la fin de la décennie, et qui est aujourd’hui promis aux A330neo. Un tel programme a aussi le mérite de laisser pleinement la place à la famille de monocouloirs qui succédera un jour au 737 MAX, alors que l’on sait que GE Aviation et Safran s’attellent déjà à l’après-LEAP pour 2035.
Mais une grande partie de la crédibilité du futur long-courrier de Boeing dépendra aussi d’une profonde maîtrise de ses coûts, qui devront être inférieurs à ceux de l’A350 et sans commune mesure avec ceux du 787, probablement dans les 10-12 milliards de dollars pour donner un ordre de grandeur. Évidemment les risques qui accompagneront le lancement du « tueur d’A330neo » peuvent apparaître démesurés aujourd’hui quand on connaît la situation financière de Boeing, même si l’avionneur pourra évidemment capitaliser sur certaines innovations pour la suite, par exemple au niveau du poste de pilotage (Le magazine Aviation Week a récemment révélé que Boeing était déjà en train de travailler à son développement).
Le géant de Seattle doit également aller vite sur le plan industriel s’il ne veut pas rater sa commercialisation, avec un lancement qui se doit d’intervenir dans les deux ans pour être compatible avec une entrée en service avant 2030. La motorisation d’un tel programme est pratiquement disponible en adaptant le GEnx, et le plus grand bâtiment du monde à Paine Field se vide peu à peu (le dernier 787 produit à Everett a été réceptionné il y a quelques jours par ANA, le programme 747-8F ne comprend plus que 12 exemplaires à livrer).
Finalement, plus qu’un « tueur d’A330neo », le nouveau projet d’avion long-courrier de capacité intermédiaire redonne du sens à la stratégie à long terme de Boeing pour son activité Avions Commerciaux. Ce qui est sûr aussi, c’est que la communication d’Airbus sur le mythique avion à hydrogène risque d’être un peu déstabilisée.
