L’anniversaire des 10 ans de l’entrée en service du Boeing 787 chez All Nippon Airways (ANA), compagnie de lancement du « Dreamliner », aurait pu être l’occasion d’une belle fête, mais il n’en sera rien. Les livraisons du long-courrier de nouvelle génération de taille intermédiaire de Boeing sont désespérément à l’arrêt depuis le mois de mai suite au différend entre l’avionneur et la FAA sur les méthodes d’inspections à adopter pour juguler les défauts de qualité constaté sur une série d’appareils l’année dernière.
Plus d’une centaine de 787 attendent aujourd’hui de pouvoir rejoindre leurs clients, et ce malgré la crise qui impacte particulièrement le segment des avions gros-porteurs depuis l’apparition de la pandémie de Covid-19.
La carrière du Dreamliner n’a clairement pas été un long fleuve tranquille, loin de là. Après une succession de retards à l’allumage repoussant son entrée en service de plus de quatre ans, on se souviendra surtout de la crise des surchauffes des batteries à lithium-ion et des conséquences opérationnelles liées aux défauts affectant les réacteurs Trent 1000 de Rolls-Royce.
Même pour les passagers, le rêve s’est quelque peu brisé pratiquement au décollage de sa carrière commercial, avec une généralisation de la densification de ses cabines économiques à neuf sièges de front, l’appareil étant une quarantaine de centimètres moins large que les 777. C’est sans doute anecdotique au regard de l’augmentation des recettes automatiquement générées pour les opérateurs, mais cela est quelque peu venu gommer un précieux atout lié à la faible altitude cabine en croisière (6000 pieds à FL430), notamment pour les voyageurs fréquents, forcement bien avertis aussi.
Mais ce qu’il faut surtout rappeler c’est que la famille Dreamliner de Boeing a largement rempli son cahier des charges en termes de performances, devenant véritablement un « Game Changer » sur le segment du long-courrier. Non, le 787 n’a pas vraiment contourné les grands hubs comme on le lit encore trop souvent çà et là, mais il a largement permis de rentabiliser des lignes qui n’auraient pas pu l’être avec des appareils de la génération précédente, même sur de très longs vols.
La famille 787 de Boeing est le résultat de choix particulièrement ambitieux, peut-être trop nombreux pour un seul programme. Généralisation des matériaux composites (80% en volume, 50% en masse), suppression des circuits pneumatiques, électrification massive des systèmes (pressurisation, démarreurs, freinage, anti-ice…), toutes ces avancées demeureront encore longtemps de profonds marqueurs pour l’aviation de demain pour faire face aux enjeux de décarbonation.
Avec 1006 avions livrés en 10 ans et près de 500 exemplaires fermes contractualisés restants, le programme Dreamliner n’en est finalement encore qu’au début de sa carrière commerciale. Gageons que la prochaine décennie sera cette fois plus en adéquation avec son surnom.
