La convention annuelle de la NBAA (National Business Aviation Association), le plus important rendez-vous mondial de l’aviation d’affaires, vient d’ouvrir ses portes à Orlando aujourd’hui pour trois jours. C’est ici que sont souvent révélés les nouveaux programmes d’avions d’affaires, leur motorisation et leurs équipements ainsi que leurs cabines. Mais c’est aussi ici qu’a lieu le plus grand nombre de transactions d’avions d’affaires, au coeur du marché de loin le plus mûr au monde.
Mais voilà, depuis la crise des subprimes, le secteur de l’aviation d’affaires n’est hélas plus en grande forme, même si beaucoup d’acteurs ont investi massivement pour renouveler leur gamme et proposer des appareils aux performances toujours plus ambitieuses et disposant d’aménagements toujours plus confortables. Un nouvel élan est même apparu après 2011 pour quelques années, mais cette timide reprise est restée fragile, avant d’atteindre le palier que nous connaissons aujourd’hui.
Les raisons qui expliquent cette morosité ambiante sont multiples et beaucoup plus complexes que ce que subissent aujourd’hui les hélicoptéristes sur le marché civil. Bien sûr, la baisse mondiale du cours du pétrole a, ici aussi, eu un impact négatif, notamment sur des marchés tels que le Brésil et la Russie, des pays traditionnellement tournés vers des appareils très haut de gamme. La Chine est aussi un marché extrêmement prometteur à moyen terme sur ce type d’appareil, mais il est freiné par une réglementation qui peine à s’ouvrir et par des perspectives de croissance moins importantes que prévu. Le niveau actuel du dollar US face à certaines devises reste aussi un élément important relatif au manque de dynamisme au niveau des acquisitions d’avions d’affaires, notamment pour de nombreux pays émergents.
Mais rappelons-le, 80% de la flotte mondiale d’avions d’affaires est basée en Amérique du Nord et en Europe. Le marché américain semblait d’ailleurs largement prêt à renouer avec une forte croissance après la fin de la crise de 2008, mais de nouveaux facteurs sont venus casser cette vague d’optimisme : difficultés des banques à financer des avions d’affaires (surtout pour un usage personnel ou corporate), baisse plus importante de la valeur résiduelle de certains appareils, ce qui a aussi engendré un très faible niveau de transaction d’avions sur le marché de l’occasion, un secteur lui-même pénalisé par une flotte souvent jugée un peu trop importante.
Jean (John) Rosanvallon, le Président de Dassault Falcon Jet, a d’ailleurs indiqué à Orlando que les conditions économiques actuelles étaient encore loin d’être optimales, se référant par exemple aux dernières prévisions sur les marges des sociétés aux États-Unis. L’incertitude liée à l’élection présidentielle américaine depuis des mois (nous sommes à J-7) aura évidemment aussi eu un impact. Il cite également l’intense guerre des prix que livrent certains avionneurs pour continuer à placer leurs appareils, et qui ont pu atteindre des réductions de jusqu’à 25%. Mais John Rosanvallon s’est montré particulièrement préoccupé par la récente chute de la valeur de certains avions à 5 ans. Leur dépréciation a pu atteindre 45%, alors qu’habituellement la baisse n’était que de l’ordre de 20% sur la même période. Difficile d’imaginer une accélération des acquisitions d’avions d’affaires neufs dans une logique de remplacement dans de telles conditions.
Pour l’instant, les quelques acteurs présents à Orlando qui se risquent à un pronostic tablent sur un retour à la croissance à horizon 2018, au plus tôt. En attendant, et en détournant un tant soit peu le sens réel du leitmotiv de la NBAA qui est placardée un peu partout ici, « no plane, no gain ! »

