Entreprise composée de 80 salariés, Telerad s’est imposée sur le territoire français en tant que fournisseur de systèmes de radiocommunication, dans le domaine de l’aéronautique et du maritime. Entreprise duale, Telerad réalise un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros, dont 60% à l’international. Le Journal de l’Aviation a rencontré le président du directoire, Patrice Mariotte, afin de saisir les enjeux qui se présentent à une PME présente à la fois sur le segment militaire et le segment civil.
Telerad est aujourd’hui reconnue comme une entreprise duale dans le domaine de la radiocommunication, à la fois aéronautique et maritime. L’est-elle depuis ses origines ?
Telerad a vu le jour dans l’après-guerre, son fondateur était radio-amateur. Les premières applications étaient destinées à la marine marchande de St Jean de Luz, donc pas du tout dans le domaine militaire, ni dans l’aéronautique d’ailleurs. Dans les années 60, Telerad a commencé à travailler pour l’aviation civile et l’un des premiers produits a été la radiobalise NDB (balises non-directionnelles, NDLR).
Par la suite, Telerad a connu une évolution technologique dans le domaine de la radio, le passage des lampes et des tubes, qui équipaient les émetteurs, au transistor. Les ingénieurs de l’époque ont été les premiers à utiliser les transistors dans les radios. Assez rapidement, Telerad a pu gagner un petit avantage par rapport à des entreprises plus anciennes, qui utilisaient encore beaucoup de technologies à tubes. A la fin des années 60, Telerad a remporté un premier appel d’offres pour l’aviation civile, c’est à ce moment-là que l’activité de l’entreprise a décollé dans le domaine aéronautique.
Avec les références civiles, Telerad, qui commence à être connu dans le domaine de la radio, a remporté un premier appel d’offres pour la Défense dans les années 70, puis d’autres contrats pour les bases aériennes par exemple. Nous avions eu jusqu’à 70% d’activités militaires contre 30% d’activités civiles jusqu’à la moitié des années 80. Puis il y a eu une transition à gérer et notre activité actuelle se répartit entre 20% pour le militaire et les 80% restants pour le civil.
Qu’apporte la culture militaire à une entreprise telle que Telerad ?
Nous avons de la chance d’avoir une technologie duale. La gamme de fréquences est différente dans certains cas, mais pour le reste c’est tout de même très, très proche. Le fait d’être dual permet notamment de vendre plus facilement sur le marché civil à l’international par exemple et permet de franchir plus facilement les étapes. Le militaire nous a également beaucoup appris sur certaines exigences, climatiques ou environnementales, les conditions de température, de vibration, les contraintes de choc. Lorsque nous avons développé des radios pour les FREMM par exemple, nous avons dû faire face à des contraintes navales spécifiques, qu’on ne retrouve pas dans nos matériels civils.
Le militaire apporte beaucoup sur les aspects robustesse, le civil apporte notamment dans le domaine de l’innovation. Nous sommes vraiment dans le dual et avançons dans les deux domaines. Dans les deux cas, il faut avoir une capacité de R&D élevée, développer de l’innovation et de la technologie de rupture, être capable d’avoir une roadmap, de voir loin, de préparer le marché. Il faut qu’il y ait de la fertilisation croisée entre les deux.
Nous avons par ailleurs quelques anciens militaires au sein de la structure, qui nous permettent de développer la culture défense, qu’on ne peut avoir qu’au travers de ceux qui l’ont vécue de l’intérieur. Le fait d’avoir reçu l’année dernière la médaille de l’aéronautique, remise par le général Soulet (commandant les forces aériennes), représente une reconnaissance de notre implication dans l’aéronautique au titre de la Défense. C’est une grande fierté.
Que représente l’appartenance à la BITD (Base industrielle et technologique de défense, NDLR) pour une PME telle que Telerad ?
Le fait d’appartenir à la BITD fait partie des références qui montrent une certaine maturité technologique. Cela permet de faire savoir que nous avons ces références du militaire, c’est un gage de qualité, mais c’est aussi accéder aux technologies de demain. A cet égard, le pacte Défense-PME nous permet par exemple de travailler en direct avec la DGA, mais aussi d’interagir avec les grands intégrateurs français et étrangers.
Telerad est également en contact étroit avec la DGA…
Dans le cadre du dispositif RAPID, nous sommes suivis par DGA MI (Maîtrise de l’information), avec qui nous avons des discussions intéressantes, sur le programme actuel, mais nous allons également au-delà, pour pouvoir nous projeter dans le futur. Nous apportons à la DGA des partages de vision, qui ouvrent vers des ruptures technologiques.
L’autre intérêt, c’est l’opportunité de présenter des technologies aux grands groupes et de rencontrer leurs équipes et leurs experts, avec qui nous pouvons échanger sur les besoins de demain, ce qui enrichit notre réflexion et notre roadmap.
La DGA joue également un rôle dans les perspectives d’exportation. Telerad a ainsi eu la chance de participer à une mission à Singapour à l’automne dernier, afin de rencontrer les industriels locaux, mais également les entreprises françaises implantées sur place. Se déplacer avec la DGA ouvre des portes, des opportunités, un réseau.
Comment envisagez-vous les prochaines années pour Telerad ?
Dans le domaine de la Défense, nous prévoyons une fenêtre de quatre à cinq ans, pendant laquelle il y aura une augmentation du besoin, liée à l’évolution réglementaire (le passage des VHF compatibles en 8.33 kHz, NDLR). Nous nous positionnons également sur d’autres programmes, aussi bien au niveau national qu’européen.
Des opportunités s’offrent également à nous aux États-Unis avec l’US Air Force et l’US Navy, au travers d’un accord de partenariat avec General Dynamics. Cela a notamment été rendu possible suite à la vente de 30 000 radios à la FAA (Federal Aviation Administration, NDLR), ce qui nous a ouvert des portes supplémentaires sur le marché à l’export.