À quoi pourra bien ressembler le monde du transport aérien dans les 10 ou 15 prochaines années ? L’exercice est difficile, alors que le secteur connaît la plus profonde et sans doute la plus durable des crises de son histoire depuis le mois de mars. L’incertitude domine toujours et les perspectives à moyen terme se teintent à nouveau de pessimisme faute de réelles avancées sérieuses au niveau des restrictions sur les voyages, notamment au niveau des tests et des quarantaines.
Si le transport aérien est aujourd’hui en mode survie, les compagnies aériennes ont déjà imaginé à quoi ressemblera la reprise et les premières mesures de restructurations annoncées sont lourdes de sens, avec des réductions d’emploi massives, le retrait des avions les plus anciens, les plus difficiles à remplir, ou les moins polyvalents dans les flottes, une diminution générale de leur capacité et une réduction de leur réseau. Comme après chaque grande crise, le transport aérien n’échappera pas à un phénomène d’attrition plus ou moins durable. Mais plus la crise sera longue et plus le monde du transport aérien que nous avons connu sera profondément modifié.
La crise sera très certainement un catalyseur des tendances les plus notables de ces dernières décennies et la recherche du CSKO (coûts par siège/kilomètre offert) le plus bas sera sans doute le nouveau Graal des compagnies aériennes, à défaut de pouvoir trouver de nouvelles solutions pour augmenter le prix des billets dans un contexte général de paupérisation, voire de changement des habitudes des passagers dans certaines régions du monde.
Augmentation de la productivité, simplification des flottes et des services, nouvelle densification des appareils long-courriers, généralisation encore plus poussée des revenus auxiliaires, nouveaux accords syndicaux…, les compagnies aériennes vont très logiquement chercher par tous les moyens à dégager des marges opérationnelles.
Il n’est finalement plus question ici d’opposer drastiquement le modèle des compagnies « low-cost » point-à-point à celui des compagnies traditionnelles « full service » avec leur hub – qui continuera assurément encore longtemps d’être le seul moyen d’assurer une couverture maximale de destinations avec un minimum d’avions. Une très grande majorité des passagers voyageant en classe économique ne voient d’ailleurs plus vraiment de réelles différences au niveau des services proposés par les deux modèles, que ce soit au sol ou à bord, et notamment en Europe ou en Amérique du Nord.
Dans un tel contexte, l’augmentation des recettes unitaires sera difficile et les compagnies à bas coût continueront à accroître leur réseau et à prendre des parts de marché. Les autres ne pourront les imiter qu’en adaptant leur base de coût face à une nouvelle pression qui n’aura jamais été aussi intense, même pour des compagnies aériennes massivement soutenues par des États-stratèges.
Qu’on le souhaite ou non, l’avenir du transport aérien sera définitivement low-cost, ou il ne sera plus.

