C’est un fait. Notre grand voisin d’outre-Rhin se réarme depuis quelques mois et il affiche désormais de réelles ambitions pour sa défense. La mise en place d’un fonds exceptionnel de 100 milliards d’euros pour moderniser son armée dans les toutes prochaines années est déjà une réalité sur le plan des commandes et notamment dans le domaine de l’aviation militaire.
En quelques mois seulement, l’Allemagne s’est ainsi décidée à acheter 15 nouveaux Eurofigher Typhoon en configuration « Quadriga » mais surtout 35 F-35A pour remplacer ses vieux Tornado. À cela s’ajoutent bien sûr quelques drones Heron-TP armés, 21 Eurodrone (qui finiront probablement armés aussi), 5 Boeing P-8A Poseidon pour remplacer ses P-3C Orion (avec l’acquisition de 7 nouveaux exemplaires à l’étude) et 60 hélicoptères CH-47F Chinook en version Block II Standard Range pour remplacer ses Sea Stallion. Sont aussi déjà dans les tuyaux la possible acquisition d’hélicoptères d’attaque AH-64 Apache, peut-être au détriment de la modernisation de ses 51 Tigre au standard Mark III, mais aussi jusqu’à 55 hélicoptères H145M à cinq pales en tant qu’hélicoptères d’attaque légers.
Il manque bien sûr aussi à l’appel le plus important programme de coopération européenne en matière d’armement, le SCAF, qui s’oriente toujours un peu plus vers un futur fiasco au regard des divergences croissantes affichées publiquement par Airbus et Dassault Aviation ces dernières semaines.
Mais Berlin ne va sans doute pas s’arrêter là, car les ambitions récemment affichées dépassent très clairement la simple modernisation de ses équipements, même si elle implique de fait aussi une très nette extension de ses capacités. L’Allemagne compte investir entre 70 et 80 milliards d’euros par an dans sa défense d’ici 2025, pratiquement 60% de plus que ce qui est prévu aujourd’hui dans la loi de programmation militaire (LPM) en France pour le même horizon. Cela représente aussi l’équivalent d’un peu plus de 2% de son PIB, révélant l’écart de richesses qui ne cesse de se creuser entre les deux rives du Rhin depuis une vingtaine d’années.
Les déclarations du chancelier fédéral Olaf Scholz à l’issue du sommet de l’OTAN qui s’est tenu à Madrid la semaine dernière en disent long, avec cette « Allemagne qui disposera bientôt de la plus grande armée conventionnelle des pays de l’OTAN en Europe ». La notion d’armée conventionnelle prêterait même à sourire quand on se souvient des raisons qui ont écartés les F/A-18F pour la Luftwaffe.
En clair, en plus d’être la plus importante puissance économique en Europe, l’Allemagne veut désormais aussi devenir la première puissance militaire du continent. Et même si on peut se consoler en France en louant la réelle expérience de nos forces armées au combat, soutenue par une doctrine solide pour ses interventions, cela fait quand même clairement rêver…
