Les jeux sont faits. Sans réel suspense, Airbus est à nouveau le leader mondial incontestable des avions de ligne, et ce pour la troisième année consécutive.
Avec un écart de très exactement 293 avions commerciaux livrés (en excluant les variantes à vocation purement militaire), l’avionneur européen a encore largement dominé son sujet en 2021 face à son concurrent de toujours, et ce dans un environnement particulièrement difficile, vu le manque de visibilité opérationnelle, et financière, des compagnies aériennes avec les vagues épidémiques successives et les malheureuses restrictions de voyages induites.
Les choses se sont quant même finalement grandement améliorées l’année dernière du côté de Boeing, avec le retour des livraisons du 737 MAX. Mieux, l’avionneur américain est même passer devant Airbus en termes de prise de commandes pour l’ensemble de sa gamme (en commandes brutes, c’est à dire sans prendre en compte les annulations), avec un total de 866 avions de lignes vendus (passagers et cargo, hors P-8 et KC-46), contre 768 chez Airbus (hors A330-200 pour Airbus DS), et ce en dépit des très rudes échecs commerciaux encaissés pour sa nouvelle génération de monocouloirs en fin d’année, avec les décisions de Qantas et d’Air France-KLM quant au remplacement de leurs flottes de 737NG.
Les mauvaises langues diront d’ailleurs que nombre des nouveaux monocouloirs contractualisés par l’avionneur de Seattle sont encore vendus à des prix qui défient les lois du marché, voire au mieux sont accompagnés de très substantiels arrangements au niveau de l’après-vente, une activité qui reste encore d’ailleurs l’un des atouts de Boeing (support et optimisation opérationnelle, solutions de gestion des équipages, préparation des vols, gestion documentaire, formations…). La présentation des résultats financiers le 26 janvier prochain sera à analyser finement…
Il n’en reste pas moins que Boeing a forcement déçu en 2021, avec un nombre de 737 MAX livrés qui reste très inférieur aux attentes (245 exemplaires sur l’année), même si les choses vont certainement continuer à s’améliorer dans les prochains mois avec la levée des dernières restrictions de vols à travers le monde (Indonésie, Éthiopie et Chine) et l’entrée en service du 737-7, la version la moins capacitaire de la famille (le 737-10 sera quant à lui introduit en 2023). Les livraisons de 737 MAX restent finalement à peine supérieures à la faible cadence de production (19 avions par mois, en augmentation vers 31 exemplaires dans les prochains mois), loin derrière la famille A320neo d’Airbus (483 appareils en 2021), retardant l’essor d’une famille d’appareils moyen-courrier qui par définition correspond à la demande la moins impactée par la crise liée à la pandémie.
La famille 787 manque de son côté toujours à cruellement à l’appel (14 avions livrés seulement en un an), les livraisons étant interrompues depuis le mois de mai sur décision de la FAA suite aux défauts de qualité constatés sur certains exemplaires, livrés ou non. Boeing continue néanmoins à améliorer sa famille Dreamliner pour les jours meilleurs, avec par exemple une future augmentation attendue au niveau de la masse maximale au décollage du 787-10 (on se souvient que les 787-9 et -10 partagent la même MTOW de 254 tonnes, cantonnant de fait la version le plus capacitaire à des lignes plus courtes). Quant au futur 777X, les incertitudes quant à sa date de mise en service demeurent, avec au passage le risque qu’une compagnie aérienne cliente comme Etihad Airways saute finalement définitivement du train en marche.
En fait, les déboires de Boeing et son (trop) long retour sur le devant de la scène mondiale pénalisent toute l’industrie aéronautique, même en France. Du simple bouton poussoir de poste de pilotage, jusqu’au réacteur LEAP-1B (motorisation exclusive du 737 MAX à moitié produite par le groupe Safran), en passant par des atterrisseurs, des portes, des sièges ou encore par l’imposant actionneur de plans horizontaux du 777X ; de nombreuses sociétés françaises ont su se diversifier en montant à bord de la gamme de l’avionneur de Seattle. Et toutes attendent plus qu’un simple sursaut d’orgueil, elles attendent le véritable rebond de Boeing…


