Une nouvelle compagnie aérienne vient de naître dans le ciel français et nous lui souhaitons un très bon vol, tant ce type d’initiative est rare dans notre pays. Avec French Blue, le groupe Dubreuil dispose désormais, à côté d’Air Caraïbes, d’une compagnie aérienne extrêmement compétitive sur des destinations vacances, à l’image de ses premières rotations sur la République dominicaine.
Mais dire que French Blue est la première compagnie aérienne française low-cost long-courrier, comme on est en train de nous le rabâcher un peu partout et notamment dans la presse touristique c’est sans doute y aller un peu fort.
Bien sûr, les salariés de la nouvelle compagnie ont dû faire des concessions salariales par rapport à ceux d’Air Caraïbes, tout en affichant un gain de productivité non négligeable. Le premier A330-300 de French Blue voit aussi son aménagement modérément densifié par rapport aux appareils de sa compagnie soeur, affichant d’ailleurs une capacité égale (à un siège près) aux A330 d’AirAsia X, le modèle du genre aujourd’hui, et fort heureusement pour les passagers, bien loin de la configuration record de Cebu Pacific.
Citons aussi le développement d’une multitude de prestations payantes dont le modèle a été largement développé par les compagnies à bas tarifs. Bagage en soute, boissons, repas, attribution du siège et choix des zones, accès au lounge, accès prioritaire, Wi-Fi, casque audio, tout est désormais à la carte pour les passagers, French Blue misant largement sur les fameuses recettes auxiliaires, à un niveau jamais atteint par une compagnie française jusqu’à présent.
Mais French Blue se détache aussi du modèle des compagnies low-cost long-courrier pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce que son modèle est encore tributaire des tour-opérateurs, un choix qui sied parfaitement au remplissage des vols mais qui n’entre évidemment pas dans une logique de réduction des coûts. Autre différence, de par sa taille, il est encore difficile d’imaginer des économies d’échelle autres que les synergies avec sa grande soeur. Quant au plus inquiétant, avec le lancement l’année prochaine de vols plus longs (12 heures) en A350 vers l’océan indien, tout porte à croire que le taux d’utilisation des appareils sera très loin des standards du modèle.
On l’aura compris, qualifier French Blue de première compagnie low-cost long-courrier française, c’est finalement oublier la multitude d’initiatives qui se sont succédées depuis une trentaine d’années dans le transport aérien français, souvent sur les DOM, pour en réduire les coûts. Citons par exemple Aéromaritime, les vols Jumbo d’Air France, Corsair, la tentative malheureuse d’Air Lib Express sur les Antilles, les vols adaptés COI d’Air France, XL Airways… À chaque fois, l’idée était de réduire les coûts pour pouvoir continuer à exister sur des dessertes extrêmement concurrentielles et à faible yield. Lors de l’annonce de son lancement en mars 2016, Marc Rochet, son président avait d’ailleurs bien précisé qu’il s’agissait une compagnie « smart cost » plutôt que d’un modèle purement low-cost.
Aussi à défaut d’être la première compagnie low-cost long-courrier française, disons qu’il s’agit plutôt finalement d’une nouvelle compagnie low-cost long-courrier à la française. Et rappelons une nouvelle fois le désormais célèbre aphorisme : « On naît low cost, on ne le devient pas ».
			

