BA 123 d’Orléans-Bricy, CIET, 8h du matin. Le briefing qui se tient dans les locaux flambant neufs du centre d’instruction des équipages de transport regroupe une bonne trentaine de personnels militaires, français, allemands, italiens, espagnols et belges. Briefing tactique, briefing météo, tous les points d’attention sont présentés et décortiqués, afin d’appréhender au mieux la mission de l’après-midi.
Le stage EAATTC, pour European Advanced Airlift Tactics Training Course, « vise à fournir aux équipages de transport militaire un cursus de formation tactique afin de renforcer l’interopérabilité entre les forces aériennes européennes ». Il s’agit de confronter les équipages à des scenarii inspirés de situations opérationnelles, de les habituer à voler en patrouille interalliée afin de mieux appréhender les futures opérations menées en coalition. Organisé par l’Agence européenne de Défense et l’EATC (European Air Transport Command), l’EAATTC réunit cette fois-ci 140 personnels issus d’équipages allemands, belges, espagnols, français et italiens, ainsi que six avions, C-130 Hercules et C-160 Transall.
Onze jours de travail intense, six instructeurs, cours théoriques, huit vols par équipage, et un certificat d’aptitude à la fin, voilà ce qui attendait les nations participantes à l’EAATTC du 18 au 29 mai dans le Loiret. Le directeur du stage, qui travaille par ailleurs à l’EATC, précise qu’il s’agit d’entraîner tous les équipages sur le même type de missions et de standards : « Ils [les équipages] ne travaillent pas toujours ensemble, il n’existe pas de standardisation entre les pays, nous devons donc être un peu plus stricts sur ce que nous voulons voir sur chaque vol. Les standards qu’ils suivent et appliquent ici ne sont pas forcément ceux qu’ils ont l’habitude d’avoir chez eux. »
Si l’entraînement prévoit le largage de matériels et de parachutistes, l’EAATTC n’est pas axé sur les techniques de largage, mais bien plus sur la planification de la mission et l’interopérabilité. Après les deux stages « single ship » qui se sont déroulés à Saragosse (Espagne) à l’automne 2014 et à Plovdiv (Bulgarie) au printemps 2015, l’EAATTC 15-2 se présente comme le premier stage « multiship », qui va confirmer les aptitudes des équipages à voler en patrouille. Le « training supervisor » explique que quatre vols se feront en tant qu’ailier, les quatre autres en tant que chef de patrouille. « Tous les équipages sont confirmés comme ailiers, là on les entraîne à prendre des décisions, on leur apprend la gestion de patrouille. »
A 9h, six équipages se répartissent dans trois salles différentes pour préparer le vol. Un C-130 français volera avec son « homologue » espagnol, tandis que le second binôme sera constitué d’un C-160 allemand et d’un C-130J italien et le troisième réunira un C-130 belge et un C-130 français. Deux officiers jordaniens naviguent entre les salles. « C’est la Jordanie qui a demandé à participer », d’abord en tant que nation observatrice, avant, peut-être, d’intégrer le stage. Car si le cours n’est en théorie ouvert qu’aux membres de l’EATF (European Air Transport Fleet), il se pourrait bien qu’à l’avenir d’autres nations rejoignent les bases de Saragosse, Plovdiv ou Orléans.
La raison de cet intérêt est simple : Il n’existe pas d’équivalent de ce cours, mis à part aux États-Unis. L’AATTC (Advanced Airlift Tactics Training Center) était jusque-là le seul stage multinational de ce type, ouvert à toutes les nations alliées. Cependant, en raison des énormes besoins américains et du peu de créneaux disponibles, l’EAATTC apparaît comme une opportunité intéressante pour les nations qui n’auraient pas la possibilité de déployer du personnel et des avions jusqu’aux États-Unis. Même l’US Air Force pourrait en bénéficier et profiter ainsi de la proximité géographique de la base de Ramstein en Allemagne, au lieu de faire traverser l’Atlantique à son personnel et ses avions uniquement pour participer au stage.
L’après-midi, les vols tactiques se feront à basse altitude dans une météo plutôt capricieuse, à tel point que le largage des parachutistes du 1er RCP depuis le C-130 de l’armée de l’air sera décalé et n’aura lieu qu’à la toute fin du vol. Entre temps, dans le cockpit, les virages s’enchaînent, sous l’œil vigilant de l’instructeur italien, qui contrôle les manœuvres de l’équipage français aux commandes de l’Hercules. Fin de mission, débriefing, fin de journée. Si tout se déroule comme prévu, les équipages recevront ce 29 mai un certificat. Pour les aviateurs français, l’EAATTC a même fait office de cours de qualification, avec notamment deux vols de nuits.
Prochaine étape pour les avions et les équipages de transport, l’exercice EATT (European Air Transport Training) à Beja, au Portugal, du 14 au 26 juin.