Une province sécessionniste qui récupère des moyens lourds pour combattre, l’envoi de troupes de protection pour les populations civiles locales, la lutte contre les insurgés, d’importants moyens aériens déployés, ainsi que des troupes au sol… Le scénario pourrait faire penser à une certaine situation dans une certaine région, mais ce n’est « que » l’exercice Serpentex qui s’achève ce 3 octobre sur la BA 118 de Mont-de-Marsan. « Il n’y avait pas de visée sur l’adaptation d’un scénario qui pourrait arriver demain, comme ça pourrait être le cas en Europe de l’Est, car nous avons préparé cet exercice depuis des mois, mais c’est vrai, l’actualité nous a rattrapé », explique le lieutenant-colonel Aribaud, directeur de l’exercice.
L’exercice Serpentex est destiné, depuis ses débuts en 2007, à améliorer le guidage et l’appui aérien, ainsi que la communication entre les « forward air controller » (FAC), les contrôleurs aériens avancés, et les aéronefs en survol sur la zone. Fruit du retex de l’expérience de terrain en Afghanistan, Serpentex se tenait traditionnellement sur la BA 126 de Solenzara, en Corse. L’exercice a lieu pour la première fois sur la BA 118 de Mont-de-Marsan, offrant « plus d’opportunité en interarmées », selon le LCL Aribaud, ainsi qu’une baisse des contraintes logistiques liées à l’acheminement des personnels et du matériel sur place. La proximité du champ de tir de Captieux, le plus grand champ de tir français, permet aux aéronefs de continuer l’entraînement aux tirs.
Serpentex 14 bénéficie également d’un « appui renforcé » du CEAM, le Centre d’expériences aériennes militaires, qui a notamment intégré le système de liaison de données et de bibliothèque de données Decalco – matérialisé par une tablette – sur un des Rafale du 2/30.
Quelques 700 personnels ont été mobilisés entre le 15 septembre et le 3 octobre, dont 500 de l’armée de l’air, une centaine de l’armée de terre et 130 de nations étrangères (Allemagne, Belgique, Canada, Espagne, États-Unis, Grande-Bretagne, Italie, Slovénie). Des Rafale, des Mirage 2000N/D, des avions de transport, des hélicoptères Puma, Caracal, Fennec, un ATL2, un AWACS, un drone Harfang, des Hawk de la Royal Air Force, des AMX italiens et des EF-18 espagnols ont participé aux différentes missions.
Une trentaine d’équipes FAC – aussi bien françaises qu’étrangères – ont été mobilisées pour Serpentex. Chaque jour, une quinzaine d’entre elles se retrouvent sur le terrain, pendant que les autres débriefent la mission de la veille et préparent celle du lendemain. Une équipe est composé de quatre personnes minimum : un FAC qualifié, un opérateur radio, un chauffeur et un personnel « multitâches ».
« Le FAC travaille en équipe et suit – le plus souvent – une équipe de l’armée de terre sur le terrain. C’est lui qui demande un appui aérien en cas de besoin et il communique en permanence avec l’aéronef en cas de difficultés », explique le capitaine R., FAC de l’armée de l’air. Il est « mis à disposition » d’un chef interarmes, en tant que « principal conseiller », car il connaît de manière très poussées les règles tactiques et les règles d’engagement (ROE – Rules of engagement).
La coopération entre les composantes terrestre et aérienne est constante et essentielle, comme le rappelle le capitaine C., pilote de Rafale : « Le soutien aérien rapproché ne peut se faire sans l’aide du FAC, et réciproquement. C’est un vrai travail d’équipe, car chacun a des compétences que l’autre n’a pas, le travail est vraiment complémentaire ».
Langue internationale de référence, c’est l’anglais qui rythme les échanges entre les FAC et les pilotes. « L’appui aérien n’est pas forcément national, il est souvent étranger, il s’agit donc d’assurer la coordination entre le personnel au sol et dans les airs», explique le LCL Aribaud. La coopération entre les nations a été « éprouvée » en Afghanistan et les normes otaniennes ont permis de standardiser les communications.
Afin de faire prendre conscience de l’imbrication du terrestre et de l’aérien dans la plupart des missions menées par les armées françaises actuellement, l’objectif pour l’édition 2015 de Serpentex sera d’intégrer encore plus l’armée de terre, et en particulier la composante aéroterrestre, l’ALAT (Aviation légère de l’armée de terre). Le COMALAT, le général Gourlez de la Motte, a d’ailleurs effectué une visite sur place la semaine dernière, afin de saisir l’enjeu de telles manœuvres interarmes. Si quelques hélicoptères étaient présents, une participation plus « massive » des rotors tournants fera gagner Serpentex en profondeur et en « réalisme opérationnel », de quoi préparer de manière améliorée les futures missions des forces armées françaises.