Cette 18e édition du salon aéronautique de Dubaï ne sera sans doute pas qu’une simple poursuite des affaires pour le monde de l’aviation commerciale au Moyen-Orient.
Bien sûr, les principales compagnies aériennes de la région ont repris des couleurs avec la fin des restrictions de voyages et elles affichent de solides résultats, à l’image du géant Emirates qui vient de publier un bénéfice de 2,6 milliards de dollars pour les six derniers mois, en progression de 134% en un an. La grande compagnie de Dubaï a ainsi réactivé pratiquement toute sa flotte de transport de passagers (132 Boeing 777 et 104 Airbus A380 en service) pour répondre à la forte demande mondiale et se prépare à l’arrivée de ses A350-900 (été 2024) et de ses 777-9 (2025), avec toute une chaîne de valeur qui doit se mettre en place sur place pour en assurer le soutien.
Les choses bougent aussi pour sa voisine Etihad qui aura déménagé l’intégralité de ses vols au « Midfield Terminal » le 14 novembre, donnant pour le coup à la capitale des Émirats arabes unis un aéroport à la hauteur de ses ambitions. C’est même l’information qu’il ne faut pas rater durant ce Dubai Airshow, les projets aéroportuaires d’une telle envergure n’étant finalement pas si courants. Contrairement à ce qui se passe en Europe d’aujourd’hui, les gestionnaires d’aéroports, les compagnies aériennes nationales et leurs régulateurs sont d’intimes partenaires qui viennent directement favoriser le développement et le rayonnement des pays concernés, à l’image de ce qui s’est aussi produit à Doha (2014) ou à Mascate (2018) durant la dernière décennie.
Mais ce qui occupera surtout la majorité des journalistes présents au salon aéronautique de Dubaï, c’est les annonces de nouvelles commandes d’avions de ligne. Selon le dernier Global Market Forecast d’Airbus, le Moyen-Orient devrait d’ailleurs accueillir plus de 3400 nouveaux avions commerciaux dans les 20 ans dont 1600 gros-porteurs, alors qu’elle n’en alignait qu’un peu moins de 1300 durant la pandémie. La situation géopolitique au Proche-Orient (et ces risques d’escalade à tout le Moyen-Orient) est évidemment surveillée comme du lait sur le feu par tous les transporteurs de la région, mais ses conséquences sur de potentiels nouveaux contrats d’appareils, dont les calendriers de livraison n’auront jamais été aussi lointains, n’aura de toutes les façons que peu d’influence.
Car ce qui commence peut-être à se dessiner à Dubaï, c’est des prises de décisions importantes pour la prochaine décennie et au-delà. On pense évidemment à l’après A380 chez Emirates, mais pas seulement. Les fameuses ME3 seront bientôt rivalisées par les puissantes ambitions de l’Arabie Saoudite, avec la naissance programmée de la riche Ryadh Air à partir de 2025, mais aussi par celles du groupe Tata en Inde avec un véritable sursaut d’orgueil pour Air India. Mais c’est sans compter aussi sur la puissante Turkish Airlines qui continuera aussi de prendre des parts de marché sur les flux reliant l’Europe et l’Asie, le véritable moteur des grandes compagnies du Golfe jusqu’à présent (des premières fuites annonce une gigantesque commande d’A321neo et d’A350) .
L’essor des ME3 a sensiblement marqué le monde du transport aérien depuis 20 ans. Mais avec la poursuite du déplacement du centre de gravité de l’activité économique mondiale vers l’Est, leur positionnement sera nécessairement de plus en plus envié, imité et concurrencé. De beaux investissements en perspectives…

