Les décisions se rapprochent inéluctablement et ces futurs contrats seront lourds de sens pour l’industrie aéronautique européenne et pour l’Europe de la défense.
Varsovie doit en effet trancher sur le remplacement de ses huit avions de transport Hercules, des C-130E/H fournis d’occasion par les États-Unis à partir de 2009. Sur le plan civil, la compagnie aérienne nationale LOT Polish Airlines souhaite pour sa part acquérir de nombreux avions monocouloirs pour remplacer ses E-Jet et pour fortement accroître sa flotte. Dans les deux cas, les avionneurs Airbus et Embraer sont finalistes et les décisions seront éminemment politiques.
On se souvient évidemment de l’annulation des 50 H225M Caracal d’Airbus Helicopters en 2016, un véritable affront commercial alors que la Pologne n’avait cessé de s’approvisionner aux États-Unis pour ses besoins militaires depuis son entrée dans l’UE en 2004. Même chose pour LOT, compagnie 100% Boeing depuis la sortie de ses appareils de conception soviétique dans les années 90 (hors avions régionaux).
Mais les choses vont peut-être changer. Varsovie se montre désormais intéressée par les A400M et A330 MRTT d’Airbus Defense and Space pour renforcer ses capacités. Quant à LOT, l’avionneur européen a soumis sa proposition finale il y a deux mois pour jusqu’à 84 appareils, un panaché d’A220-100 et d’A220-300.
Ce n’est cependant pas encore un « done deal » et l’avionneur Embraer a aussi de bons atouts en main. Les multiples succès du KC-390 en Europe sont évidemment là pour le prouver (Portugal, Hongrie, Pays-Bas, Autriche, Slovaquie, Suède) et la famille E2 a déjà un (petit) pied dans la flotte de compagnie aérienne polonaise, avec 3 exemplaires pris en leasing. LOTAMS, la division MRO de LOT, sera par ailleurs le premier centre de services européen agréé pour les Embraer E2 dans les prochains mois. Ce qui est sûr aussi c’est que le motoriste Pratt & Whitney sera l’un des grands gagnants, motorisant à la fois les A220 et les E-Jet E2 avec la famille GTF, tout en étant fortement présent sur le V2500 d’IAE pour le KC-390, sans parler de ses partenaires dans la maintenance déjà présents en Pologne…
En attendant, la prochaine signature du traité de Nancy le 9 mai entre Emmanuel Macron et Donald Tusk sera peut-être l’occasion de venir gommer quelques décennies difficiles entre la France et la Pologne. Car l’amitié se juge aussi sur des actes.