L’Europe était dans le collimateur de l’IATA cette année. A l’occasion de l’assemblée générale de l’association, les discussions ont beaucoup tourné autour du projet de l’aéroport de Schiphol de réduire ses capacités, de la loi française sur l’interdiction des vols sur les trajets où une alternative de moins de 2h30 existe en train, des grèves du contrôle aérien en France, de l’absence d’avancée de l’Union européenne sur tous les sujets qui préoccupent les compagnies. Au point que Willie Walsh a accusé l’Europe d’être « anti-aviation ».
Si le franc-parler de l’ancien président d’IAG est réputé, l’accusation est lourde. Et Rafael Schvartzman, vice-président régional pour l’Europe, n’a pu qu’aller dans le sens de son directeur général. « Dans un sens, nous sommes des leaders en Europe, nous avons une histoire riche de développement de l’aviation, de bonnes pratiques, le marché ouvert… C’est une belle histoire. Mais aujourd’hui, nous avons la responsabilité de changer la façon que nous avons de voler et cela passe par une révolution énergétique. Ce que l’Europe ne semble pas comprendre, c’est que nous n’y arriverons pas si l’on n’adopte que des réglementations punitives. »
Et pour l’IATA, c’est bien ce qu’il se passe, y compris au niveau national. Les limitations que souhaite le gouvernement néerlandais pour réduire le bruit sont imposées sans concertation, obligeant les opposants à recourir à la voie pénale pour faire entendre leurs objections. La loi sur la limitation des vols en France est une décision purement politique, sans effet sur le climat. En revanche, les perturbations occasionnées par les grèves du contrôle aérien, qui empêchent les appareils de survoler l’espace aérien français et obligent à des détours, ont un coût environnemental.
Et le problème s’étend aux institutions communautaires. L’IATA souhaiterait que l’Europe s’impose enfin sur le dossier du ciel unique européen, au point mort depuis des années, plutôt qu’imposer des mandats d’incorporation de carburant durable ou prendre le risque d’une distorsion de concurrence avec le système d’échange de quotas d’émission de carbone, qui limitent les capacités d’investissement des compagnies aériennes pour renouveler leur flotte, soutenir les projets de production de SAF et accélérer leur transition vers l’aviation plus verte. Et les exemples semblent être nombreux.
En matière d’aviation comme ailleurs, l’Europe semble être efficace et résolue pendant les crises, oubliant pour un temps sa lourdeur administrative et sa propension à la régulation punitive. Car tout ce ressentiment ne doit pas non plus effacer complètement l’action de l’Union durant la pandémie de covid, qui a su préserver ses compagnies aériennes.