Le moins que l’on puisse dire c’est qu’il fallait montrer patte blanche cette année pour pouvoir accéder à la grand-messe européenne de l’aviation d’affaires à Genève. Le conflit en Ukraine y est peut-être pour quelque chose, mais les menaces des militants écologistes les plus virulents sont aussi, et surtout, dans le collimateur des organisateurs, au regard de ce qui s’est passé il y a quelques jours sur la plateforme de Mandelieu en marge du célèbre Festival de Cannes. Des activistes viennent d’ailleurs de bloquer une partie du trafic aérien à Cointrin aujourd’hui, c’était presque attendu, en venant s’introduire sur les aires de l’aéroport, empêchant temporairement du même coup l’accès à l’exposition statique de la convention EBACE.
Bien sûr, cette deuxième édition du salon européen dédié à l’aviation d’affaires après la pandémie est surtout l’occasion pour tous les acteurs de mieux appréhender ce net ralentissement du trafic constaté depuis quelques mois, en particulier en Europe, même si les carnets de commandes ont été solidement reconstitués depuis le rebond des deux dernières années. La filière doit aussi faire face aux problématiques de la supply chain, chaque mois plus aiguës, et qui touchent parallèlement les centres de maintenance. Et il y a aussi ce régulateur américain qui se montre toujours aussi tatillon et qui freine la certification de bon nombre de nouveaux programmes, pour des raisons diverses et variées, mais qui dans les faits pénalisent clients et OEM.
Mais s’il y a vraiment un sujet sur lequel tout le monde s’est accordé durant cette édition d’EBACE c’est incontestablement dans la communication visant à montrer comment l’aviation d’affaires a aussi pris le chemin de la décarbonation. Les nombreuses annonces sur les carburants d’aviation durables (SAF), sur les progrès intervenus sur les nouveaux programmes (cellule et moteurs), sur de nouveaux processus de fabrication, sur de nouveaux outils digitaux visant à optimiser la consommation de carburant et bien sûr sur l’intérêt de remplacer d’ancien avion d’affaires par des appareils de nouvelle génération, tous ces sujets viennent démontrer que l’aviation d’affaires est passée en mode combat face aux critiques grandissantes visant les jets d’affaires, en particulier en Europe.
Ces attaques ont d’ailleurs été qualifiées d « injustes » par le PDG de Dassault Aviation Eric Trappier à la veille de l’ouverture de la convention, alors que le rôle économique de l’aviation d’affaires est toujours sous-estimée voire absent des arguments de ses détracteurs. L’aviation d’affaires c’est seulement une trace dans les enjeux climatiques, avec 0,04% des émissions carbone mondiales.
En fait, cette édition d’EBACE vient peut-être confirmer que les attaques qui veulent interdire ou réduire l’aviation d’affaires sont le reflet d’un autre affrontement, celui qui vise à s’attaquer aux riches, aux grandes sociétés, aux puissants. À une autre époque, on aurait simplement relié ces attaques à de l’anticapitalisme. Ce qui est maintenant certain c’est que le dérèglement climatique a bon dos et que toutes les mesures visant à décarboner progressivement le secteur, comme pour toute l’aviation, ne calmeront plus les ardeurs de ses opposants. Ces deux mondes ne peuvent tout simplement plus se comprendre.
