WINGS garde le cap pour au moins dix-huit mois encore. Le pôle Skywin, le gouvernement wallon et l’Agence wallonne à l’exportation et aux investissements étrangers (AWEX) ont annoncé une nouvelle prolongation du programme de recherche sur l’aviation verte, accompagné d’un nouveau soutien financier de 16,3 millions d’euros de la Wallonie, à l’occasion d’un événement spécial organisé au salon du Bourget pour présenter les avancées du programme. Avec cette nouvelle phase, le budget global franchit le cap des 180 millions d’euros.
WINGS (Walloon Innovation for Green Skies) a été lancé en 2020, après le coup d’arrêt du secteur aéronautique – avions cloués au sol, usines arrêtées, bureaux d’études vidés. Un autre risque, moins immédiat mais non moindre, planait également : celui d’une fuite de compétences en ingénierie construites sur des décennies. « Si l’on ne peut pas le mobiliser durant trois mois, un ingénieur part. Nous risquions de perdre tout un pan de savoir », se souvient Étienne Pourbaix, directeur du pôle de compétitivité Skywin.
Pour éviter une fuite des cerveaux vers d’autres industries, la Wallonie mise sur la recherche et choisit d’investir dans la R&D collaborative. WINGS est né, avec une dotation initiale de 100 millions d’euros et l’objectif de faire travailler plus de 200 ingénieurs sur des projets technologiques liés à l’aviation décarbonée et compatibles avec les objectifs climatiques européens.
Cinq axes pour une aviation plus verte
Les recherches dans le cadre du programme WINGS s’articulent autour de cinq grands thèmes : les aérostructures, la propulsion, les systèmes de communication, les matériaux et procédés, et la digitalisation et la simulation numérique. « L’idée est aussi de se préparer aux nouvelles formes d’avion, d’être prêts pour monter sur le programme du successeur de l’A320 notamment », ajoute Etienne Pourbaix. « Il faut réfléchir à toutes les évolutions : les nouvelles architectures moteur comme l’open fan, les nouvelles architectures d’ailes et les défis qu’elles suscitent pour les opérations en aéroport… »
C’est ainsi que le volet Aérostructure s’attache notamment à travailler sur les éléments mobiles (comme les volets) ou le développement de bords d’attaque « plug and fly ». Ce projet consiste à concevoir des éléments de bord d’attaque d’aile qui seraient préassemblés, intégrés et facilement interchangeables sur les structures d’avions de nouvelle génération, réduisant la complexité au moment de l’assemblage de l’appareil mais aussi lors de sa maintenance, une fois en service. Des recherches sont également axées sur le développement de systèmes de dégivrage de nouvelle génération intégrés à la structure, qui permettraient de réduire leur consommation énergétique, par exemple en recourant à un système de dégivrage électromécanique ou à des capteurs intelligents pour adapter l’opération en fonction de la répartition du gel.
Le thème Propulsion se concentre quant à lui sur des solutions « ultra-frugales », qui pourraient notamment profiter au programme RISE puisque Safran Aero Boosters est très impliqué dans WINGS. Mais pas uniquement, puisque les chercheurs et ingénieurs travaillent également sur la propulsion à hydrogène. En parallèle, des équipes font avancer les recherches sur les nouveaux matériaux plus légers et plus durables, ainsi que sur des procédés et des traitements plus respectueux de l’environnement. WINGS s’appuie également fortement sur la force des membres de Skywin dans la simulation numérique pour développer plus efficacement les technologies et les rendre plus rapidement matures.
Une dynamique collaborative au service d’une vision industrielle
Mais la réussite de WINGS ne repose pas seulement sur les technologies qu’il explore. C’est aussi une question d’alchimie. Le programme a fédéré une vingtaine d’acteurs – trois grands industriels (Safran Aero Boosters, Sonaca et Thales Belgium), onze PME et sept centres de recherche – dans une logique de collaboration renforcée. « Ce programme a aussi permis à des personnes qui se connaissaient peu de vraiment travailler ensemble », souligne Étienne Pourbaix. « Cette dynamique est installée aujourd’hui, il ne faudrait pas l’interrompre. » Le directeur du pôle de compétitivité se réjouit donc de cette nouvelle prolongation, qui permettra de maintenir l’élan, consolider les partenariats, et accompagner la montée en maturité des technologies déjà amorcées.
Avec WINGS, Skywin et la Wallonie veulent continuer à peser dans le secteur aéronautique, en prenant toute leur place dans sa progression vers la décarbonation. Au salon du Bourget, le pôle de compétitivité et ses membres ont présenté leurs avancées et démontré que les solutions développées dans le cadre du programme étaient, plus que des pistes, des briques solides pour construire l’aviation de demain.