Le transport aérien européen entame depuis quelques jours l'une des saisons les plus solides de son histoire et pourtant une série d'indicateurs va amener les compagnies aériennes à adopter une certaine prudence.
Les résultats trimestriels récemment publiés par le groupe Lufthansa ont fait l'effet d'une bombe, mais les symptômes sont évidemment connus de tous depuis quelques mois : une surcapacité en Europe qui pèse toujours sur le yield, le cours du carburant à nouveau à la hausse, et toujours cette menace grandissante liée aux indemnités de la fameuse directive EU261.
Certes, le report du Brexit au 31 octobre a été un soulagement provisoire, mais d'autres incertitudes planent encore sur le transport aérien du continent avec le risque d'une nouvelle crise financière mondiale d'un niveau au moins égale à celle de 2008, ou encore les potentiels effets de la guerre économique menée par les États-Unis vis-à-vis de la Chine et bientôt peut-être aussi contre l'Europe.
Et si la rentabilité des compagnies aériennes européennes n'a pas atteint le niveau de celles de leurs consoeurs américaines ces dernières années, elles ont aussi multiplié les accords salariaux catégoriels et se sont lancées pour la plupart dans d'importants programmes d'investissement pour renouveler leur flotte, avec des livraisons d'avions neufs qui devraient pratiquement croître d'un tiers cette année.
Le plan de sauvetage d'Alitalia sera peut-être enfin connu dans quelques jours et il sera sans doute lourd de sens, confirmant encore que le trop grand fractionnement du transport aérien européen reste aussi fortement lié à des volontés nationales venant finalement à l'encontre de la création de valeur pour le continent, ce qui a été aussi illustré par la guerre de pouvoir menée entre la France et les Pays-Bas pour le cas Air France-KLM en février dernier.
La consolidation du transport aérien européen va très certainement se poursuivre, mais cette fois la prochaine vague de rapprochements entre compagnies se fera assurément sans intervention étatique.
Romain Guillot
Rédacteur en chef Cofondateur du Journal de l'Aviation et d'Alertavia