Une multitude d'activités sont proposées sur le site de Sport-Découverte et c'est tout naturellement que je me suis dirigée vers le parachutisme pour un saut en tandem. Pilote de ligne, l'idée me taraudait déjà depuis fort longtemps mais envisager de sauter d'un avion en parfait état de marche me paraissait totalement inconcevable !
Un rêve ancré dans le coeur des Hommes : Voler
Un voyage dans le temps s'impose avant de nous équiper pour réaliser le grand saut et rendons hommages à tous ces pionniers sans qui aujourd'hui l'aviation n'existerait pas et ne nous permettrait pas plus de nous envoler comme ils ont pu le faire, souvent au péril de leur vie.
Le vol prend son essor grâce à l'aéronaute André-Jacques Garnerin, qui, rivalisant d'ingéniosité, réalise un parachute de fortune pour s'envoler devant un public ébahi le 22 octobre 1797 au-dessus du Jardin des Mousseaux (devenu aujourd'hui le Parc Monceau). Son intrépidité lui permet de s'élever à plus de 700 mètres, exploit réitéré par la suite avec différents dispositifs de plus en plus élaborés. Wilbur Wright s'exclama alors : « C'est le plus haut acte de courage de l'aventure aéronautique ».
La voie des airs est désormais ouverte et c'est dans leur sillage que nous allons nous envoler en toute sécurité et défier ainsi les lois de la pesanteur.
Une fois le lieu et la date du tandem choisis (choix cornélien devant des offres toutes plus attrayantes les unes que les autres), le rendez-vous est aussitôt pris au centre de parachutisme de Péronne. Le certificat médical obligatoire en poche, l'attente semble interminable et ce sont les yeux rivés sur les cartes météorologiques que j'attends le grand jour. Les planètes sont alignées, le soleil est au rendez-vous et c'est avec un enthousiasme débordant que je prends la route vers la Baie de Somme pour réaliser mon rêve. Des voiles multicolores tournoient dans le ciel lorsque j'arrive au centre de parachutisme. Des frissons me parcourent la nuque lorsque je prends conscience que d'ici peu, je serai à mon tour accrochée aux suspentes à plusieurs mètres au-dessus du sol ! A peine arrivée à l'aérodrome d'Estrées-Mons, une équipe sympathique s'occupe des papiers administratifs avant de me conduire au hangar dans lequel les parachutistes s'affairent dans le plus grand silence, avec pour seul bruit environnant le ronronnement de la turbine de l'avion largueur du jour, un Pilatus PC-6 B2-H4.
Le moment du briefing approche et mon moniteur, Manu, se présente succinctement. J'apprendrai par la suite qu'il totalise plus de 15 000 sauts et qu'il est triple champion du monde de voile contact. Discret et bienveillant, il m'explique les règles de base avant de sauter. Positions à adopter, conditions de largage et gestuelles n'ont bientôt plus de secret à force de les répéter (et ce n'est que le début car le maître-mot du centre est SECURITÉ). Une fois harnachée, nous n'avons plus qu'à patienter pendant que le vidéo-man choisi pour l'occasion, Kriss, filme chaque étape qui va me conduire au grand saut. Un professionnel qui a plus de 8 000 sauts à son actif et ne se départit pas un seul instant de son sourire. Il virevolte autour de nous avec sa caméra et son énergie nous apporte un véritable réconfort avant d'embarquer. Gégé, directeur du centre, veille également à mon bien-être tout en répondant à mes interrogations. C'est bientôt l'heure et je n'en mène pas large quand nous nous avançons vers l'avion. Manu effectue les derniers réglages avant de grimper à bord hélice tournante. L'espace de la cabine s'offre à nous pendant un court instant, le temps de nous installer contre la carlingue. Le Pilatus se remplit aussitôt joyeusement, où nous entassons tant bien que mal jambes et bras entremêlés dans cet espace devenu exigu. Rapidement les rires fusent lorsque l'appareil commence son roulage vers la piste d'envol.
En quelques secondes, nous voilà en l'air. Plus moyen de revenir en arrière, une seule issue s'offre à moi maintenant : sauter de l'avion (sincèrement, je me demande ce qui a bien pu me prendre pour en arriver là). Maintenant, je ne peux plus reculer et je sens les mains de Manu m'accrocher à son harnais avec douceur tout en vérifiant minutieusement mon attirail. Nous voilà liés le temps d'un saut et ma vie repose entre ses mains, enfin plus exactement sur les deux mousquetons qui me relient à son parachute ! Même s'il parle peu, j'ai une grande confiance en lui. Kriss, assis aux côtés du pilote, me rassure pendant qu'il filme le vol. Une incroyable synergie s'est peu à peu instaurée à bord entre les parachutistes, quel que soit le niveau d'expérience, incluant également les débutants en tandem. J'ai la gorge sèche quand j'entends « trois minutes ». Le code pour signifier que le saut est bientôt proche. L'avion a atteint son altitude de largage, soit environ 4 000 m (FL 135). La porte s'ouvre, je m'attendais à un fracas du diable et un souffle glacial s'engouffrant dans la cabine mais rien ! Le stress et la concentration ont déconnecté mon cerveau des sensations environnantes. Je repense aux instructions données au cours du briefing et rappelées en permanence au cours du vol. On chemine vers l'avant de l'appareil (et ce n'est pas si simple lorsqu'on est attaché à un corps supplémentaire, une coordination de maître s'impose pour se mouvoir tout en glissant !). Je me retrouve assise au bord de l'avion, les jambes positionnées sous le fuselage et filant à plus de 130 Km/h (70 Kts). Manu est collé contre mon dos et le temps de me dire que « nooooon, je ne veux pas y aller ! », nous avons déjà sauté dans le vide. Je vous confirme : l'être humain n'est pas du tout prêt à cet exercice sans entraînement et c'est le souffle coupé pendant des secondes qui me semblent une éternité que je me retrouve sur le ventre en flottant dans les airs. Manu me tape sur l'épaule, je peux alors ouvrir les bras et Kriss est en face de moi avec sa caméra, tout sourire. Nous filons à 200 Km/h en chute libre et c'est fantastique : nous volons comme le font les oiseaux et nous jouons avec les filets d'air. Je vois soudainement Kriss plonger à une vitesse vertigineuse pendant que Manu m'informe qu'il va ouvrir sa voile. Je me sens remonter dans mon harnais, comme si une main géante nous attirait vers le firmament avant de planer doucement sous le parachute déployé. L'horizon s'offre à nous, le ciel bleu contrastant avec le jaune des champs de colza. Toutes ces impressions sont grisantes et mon moniteur me propose de prendre les commandes pendant que nous virevoltons souplement au gré de l'atmosphère : « Tu vas voir, c'est facile, ce sont les mêmes principes qu'un avion, on tire, ça vire ! » Effectivement, la voile réagit conformément et instantanément aux ordres ! Mon organisme s'est acclimaté rapidement depuis le plongeon initial et ce sont tous les sens en éveil que je savoure chaque seconde passée en vol.
Le poser est proche et lorsque nous nous établissons en longue finale, je me rends compte de la vitesse à laquelle nous évoluons : le sol défile avant d'atterrir avec souplesse. Lorsque mes jambes touchent la terre ferme, mon esprit lui, n'a pas encore atterri. La voile s'affaisse dans un doux bruissement, ajoutant de la magie à cet univers que je viens de découvrir. Je suis sonnée mais je n'ai qu'une envie, c'est déjà d'y retourner ! Le vol a duré environ une vingtaine de minutes et c'est dans une certaine hébétude que je reprends contact avec la réalité. Je flotte pendant que Manu et Kriss enlèvent mon harnais et recueillent mes premières impressions qui ne sont qu'un bonheur intense. Toute l'équipe est présente à mes côtés, même le pilote Pierre s'est joint à nous ! Lui aussi a une sacrée expérience. Ses heures de vol ? Il ne les compte plus depuis qu'il a passé les 10 000 heures sur Pilatus (et c'est sans compter les innombrables machines qu'il pilote, comme le Cessan Caravan qui vient en renfort lors de la saison estivale). Je découvre alors non seulement une fraternité hors norme au sein des parachutistes mais surtout une équipe de professionnels dont l'humilité exprime toute leur rigueur et leur savoir-faire.
Vivez cette expérience unique et rendez-vous avec Sport-Découverte pour tenter le grand saut et pourquoi pas, poursuivre avec un stage PAC afin de vous élancer seul de l'avion ? Une chose est certaine, le vol, qu'il soit en chute libre ou sous voile est addictif ! Il suffit de regarder les yeux de Gégé, Manu ou Kriss, ils pétillent de bonheur à la simple évocation de leurs sauts et leur passion est contagieuse !